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samedi 15 mars 2008

La réforme comme moyen d'éponger les coupes budgétaires

Alors, M. Tehami sur le blogue du Raeq a soumis des tableaux pour contrer l'opinion de M. Saint-Germain de la FAE qui croit que la réforme est un moyen commode pour le MELS de couper en Éducation.

Je lui ai fait ce commentaire:


M. Tehami,

Je me demande si les coupes faites dans les années 1990 n’ont pas finalement mené à la réforme pour finalement éponger tous ces manques à gagner. Une baisse de 29,2 à 25,9 % du PIB pour l'éducation de 1992 à1999 doit bien correspondre à quelque chose dans la réalité, non? Si l’on s’en tient à la tendance des années 2000, on ne verra évidemment pas que l’Éducation a été singulièrement amputée dans ses budgets de fonctionnement.

Il est assez remarquable de voir comment les données récentes du MELS sont présentées en fonction d’une logique qui escamote ces coupes faites dans les années 90. Vous ne vous rappelez pas qu’on annonçait en ces années des coupes de plusieurs centaines de millions régulièrement sous l’impératif des déficits 0. L’école a pu continuer de fonctionner un certain temps avec la mise à la pré-retraite massive d’enseignants qui a permis de récupérer dans la masse salariale des enseignants de l’argent pour payer l’épicerie. Mais dès 2000, la réforme et l’intégration des élèves en difficulté, avec une tendance nette à ne plus les évaluer, se sont installées dans nos écoles. Déjà, on notait dans ces années que même ceux qui avaient des cotes avait souvent de la peine à recevoir des services. On utilisait les sommes des EHDAA pour payer aussi l’épicerie.

Bon, en cherchant, on peut trouver des données, qui ne sont jamais simples à comprendre, mais j’ai fini par trouver ce résumé éclairant :

Un document intéressant du gouvernement du Budget 2001-2002 montre l’évolution des budgets des années 1990 (voir le tableau p.163). Grosso modo, on voit que le budget de 1990-1991 d’environ 10 milliards en éducation n’a pas bougé pendant 10 ans, toujours 10 Milliards en 2001. Il y a même eu des baisses significatives au milieu des années 1990. Pendant la même période de temps l’inflation est de 17%, si on en croit le site que vous indiquez où l’on peut la calculer. Bref, le budget pour l’éducation a perdu pendant les années 1990 près de 1/5 de sa valeur. On le sait, on a mis massivement les profs expérimentés avant leur temps à la retraite et on a commencé la politique d’intégration des élèves EHDAA en classe normale. Faut-il rappeler qu’on allouait une subvention doublée en dollars pour des enfants reconnus en difficulté? 15% des jeunes, il me semble, recevait cet argent et on l’utilisait pour des services adaptés quand j’ai commencé à enseigner dans les années 90..

Bref, si on tient compte de la réalité des années 1990, ne peut-on pas être d’accord avec M. Saint-Germain ou, à tout le moins, constater que les États généraux coïncidaient avec un contexte particulièrement incisif de coupes. Puis, la réforme, notamment en intégrant les élèves en EHDAA en classe normale, en n’évaluant plus les élèves, en les dés-étiquetant lors du passage primaire-secondaire des élèves en difficulté, et en reléguant le redoublement (500 millions d’économie par an) à une mesure exceptionnelle, ne vient-elle pas finalement rééquilibrer le manque à gagner des coupes des années 1990.

Mais il y a bien autres choses qu’on a fait aussi pour économiser. Les bacs 4 ans des enseignants a permis de rendre normal pour tout enseignant la prise en charge de plusieurs matières en plus d’endoctriner bien solidement la valeur de la réforme dans la tête des jeunes enseignants.. On alloue plus volontiers des 26 périodes (que 24 auparavant) par cycle à un maximum de profs, avoir 2 niveaux d’enseignement du français à mon école est pratiquement la norme, ce qui permet de sauver des postes ici et là, de la masse salariale ou de baisser sensiblement les ratios, ce qui paraît bien sur le papier, mais se traduit par une augmentation de la tâche des enseignants.

On a alloué de l’argent pour les enfants en difficulté dernièrement, l’école va se payer une orthopédagogue de plus . Vous croyez que ça va changer quelque chose à la réalité difficile que nous vivons des classes régulières au secondaire surchargées d’élèves qui ont des retards scolaires non reconnus. Les manuels-réformes ne tiennent absolument pas compte de cette réalité. Ce matériel constamment servis à la dernière minute depuis des années ne donnent aucune prise à la critique. Si on ajoute que peu d’enseignants du réguliers ont été préparé à recevoir une telle quantité d’élèves en difficulté, on comprendra que beaucoup d’entre eux ressentent un malaise. Je soupçonne qu’on éponge les résultats désastreux qu’obtiennent les jeunes confrontés à ce matériel rédigé pour des surdoués.

Pendant que tout le monde se demande où donner de la tête, personne n’a beaucoup de temps pour confronter réellement le MELS à la réalité de terrain qui devient à mon sens assez surréaliste par moment.

Puisque les enseignants désertent massivement la profession de toutes les façons(burnouts, congés parentaux, abandon de la profession…), on entre dans nos écoles depuis des années des suppléants avec un simple Cégep pour garder les élèves occupés… Encore des économies. Vous pensez qu’on fait redoubler des jeunes non performants quand ils ont eu 4 profs pendant leur année?

Pendant ce temps, on essaie encore de comprendre comment évaluer nos compétences. On m’a balancé un article du MELS sur une compétence qu’on veut que j’évalue. Voilà l’ « in-formation » qu’on m’a donné sur le sujet! Quand je vois comment s’installe les programmes de 2e cycle de maths dans l’improvisation la plus navrante, je suis désolé, je me permets de douter sérieusement de la volonté du MELS d’implanter une vraie réforme de l’enseignement. J’ai l’impression qu’on a intérêt à entretenir la confusion pour escamoter le fait que l’école publique doit coûter moins cher et ceux qui ne sont pas contents ont juste à inscrire leur enfant dans une école privée. La plupart des enseignants considèrent sérieusement cette option pour leur propre enfant… Ce qui permet encore 40% d’économie par pipe.

Vous continuez de croire que M. Saint-Germain fabule?

On a mis mon commentaire en attente de modération... Bref, juste au cas, le voici ici!

2 commentaires:

Le professeur masqué a dit…

Et on ne parle même pas comment cet argent est dépensé! C'est surtout cela le problème: l'affectation des ressources!

Anonyme a dit…

Hep, la transparence en éducation n'est pas très claire. Enfin,y a aussi tout l'équilibre relatif entre les différents niveaux d'enseignement.

Mais bon, l'aspect financier est pas notre malheur quotidien. Avoir des manuels de merdes, avoir des communiqués du Mels remplis de directives nébuleuses, maintenir une réforme si contestée sans mettre de l'énergie à aller vraiment mesurer sur le terrain ce qu'on a réellement fait... et le résultat.

Enfin, je crois que des jeunes en difficultés ou en retards importants, ça a besoin d'un ratio particulier. Enfin, quand j'interviens en classe régulière avec trop d'enfants en difficulté, j'aurais besoin de cette mesure pour arriver à quelque chose de significatif.

Mais bon, on s'en sacre pas mal...

POur le ti-peuple, ça vaut pas trop la peine de mettre de l'argent...

Enfin, si l'argent n'est pas le nerf de l'affaire...

Le tséhami doit recevoir une petite enveloppe pour service rendu à la nation... Il doit avoir une maîtrise en désinformation... et en propagande...

Et pis je me demande ça serait pas la gang de Québec qui a le contrôle sur l'éducation? Je commence à penser déménager sur Québec pour aller voir ça de plus près... Jo aime toujours bouger!