Pages

dimanche 28 mars 2010

L'araignée de la Toile: autour des questions d'anonymat

Je viens apprendre que Charles Samares a fermé son blogue, son Facebook et son compte Twitter suite à des pressions menées par sa CS sur son hébergeur qui allait bloquer son site. On peut lire une lettre explicative de Charles sur Mario tout de go. Il va me manquer. J'ai apprécié pas mal de ces billets. Je crois que la blogosphère perd une importante contribution.

Cette histoire me fait réfléchir.

L'impulsivité du blogueur

Souvent, quand on blogue, on ne pense pas consulter un avocat avant de peser sur le bouton «Publier le message». Il faut comprendre le contexte de production d'un billet sur un blogue. Souvent, on passe quelques heures à mettre en mots une réflexion que nous inspirent des lectures, ou des expériences de terrain, ou des témoignages de collègues. Un matin, en se levant, à la presse, on note une inspiration matinale, avant d'aller au travail. Vite, à la hâte, on corrige la forme, on relie 3-4 fois le texte pour l'orthographe.  A chaud, comme ça, rarement j'arrive à être parfait et à toujours mesurer les implications de mes propos. Enfin, l'écriture de billets est souvent motivée par une émotion, un besoin de sortir, de dire, d'exprimer. Il n'est pas toujours facile de se tempérer.

Les écrits restent

Un coup publié, il arrive souvent que je revienne des dizaines de fois sur un texte. Il m'est arrivé de retirer des textes souvent pour protéger mon anonymat et celle de personnes dont je parle sans les nommer.

Toute cette culture de devenir un diffuseur de contenus Web publiables d'un clic et d'opinions sans que personne ne passe derrière pour nous avertir de problèmes dans notre communication  est franchement nouveau. On en découvre chaque jour les implications.

Je blogue anonymement en gros pour cette raison. Je n'ai pas le goût de retrouver dans trente ans mon nom associé à une fixation, à une humeur du moment, à une opinion, à une compréhension d'un moment.

Après, il y a les commentaires qu'on sème et qu'on oublie plus facilement. Sur certains blogues, on peut retirer son commentaire, mais en plein d'endroits nos traces se fixent dans l'éternité du Net. Je ne suis pas toujours fier de mes commentaires, ni de ma performance de scripteur quand je repasse quelques semaines plus tard. Il m'est arrivé en pleine rédaction d'un commentaire plus d'une fois dans une mauvaise manipulation de souris de publier mon commentaire par mégarde. Mais c'est fini, on ne peut effacer. J'ai déjà essayé de faire retirer du contenu dans des sites, je n'y suis pas arrivé simplement. J'ai l'impression qu'il faudrait que je sorte les menaces légales et il n'est même pas simple de trouver une adresse pertinente pour diriger ces demandes. Enfin, il m'est arrivé de laisser un commentaire sans m'en rendre compte dans l'avatar d'une autre personne qui avait utilisé mon portable et avait laissé ouvert son compte Google.

Anonymat pour ne pas rester figé

J'ai pris résolument la position de m'exprimer sous un pseudonyme quand j'ai entré un jour mon nom dans Google et que j'ai vu apparaître des pans entiers de mon passé, ô rien de grave, mais qui pouvaient être interprétés tout de même de bien des façons. J'ai même des élèves qui m'ont trouvé un jour et qui me mettaient en face d'une expérience transitoire de ma vie qui ne me représente que fort partiellement. Bêtement, j'avais laissé une photo en plus de moi à cette époque. Difficile de s'en sortir.

On peut simplement arguer qu'il faut assumer son passé, mais franchement je crois aussi qu'il faut parfois oublier le passé et aller de l'avant. On peut faire de nombreuses erreurs dans sa vie, où l'on apprend et qui permettent d'avancer.

De nos jours, il est simple pour un employeur de faire une recherche sur n'importe qui sur des moteurs de recherches et de se donner une idée de la personne qui se pointe en entrevue de sélection pour un job. On aura beau avoir pris de l'expérience, de la sagesse, avoir évolué, les traces du passé vont imprimer une tonalité à notre candidature qui peut ainsi être écartée et exclue sans qu'on puisse franchement se défendre face à des perceptions partielles et erronées quant à nos compétences. On devient ainsi victime de la machine infernale, du procès sans accusations précises de Joseph K. (Kafka).

Je m'étonne du peu de conscience de ces implications pour les enfants, les ados et les jeunes adultes notamment. Il est clair que, lorsqu'on a  une position, une personnalité, ou une culture familiale ou sociale qui nous prédispose à s'aligner sans trop de questionnement sur une tendance de société, les conséquences à court et moyen terme de prises de position à visière ouverte sont nettement moins importantes à première vue. Mais bon, connaissant les humains, on peut aussi redouter un changement de régime. Car, ensuite, il se pourrait qu'on regrette certaines prises de position que le Net aurait éternisé.

Quand notre regard nous porte à voir des défauts, à réfléchir autrement la réalité sociale que celle du discours interprétatif prédominant ou de l'idéologie qui prévaut, s'exprimer en son nom peut avoir plus ou moins rapidement des conséquences assez évidentes. Nos propos risquent de déranger des gens en pouvoir qui ont intérêt à maintenir l'ordre établi. La situation de Charles de Samares nous le rappelle.

J'irais plus loin. Insidieusement, nos traces sur le Web nous imposent une cohérence, une constance et nous cristallisent dans des positions sur lesquelles on pourrait changer ou évoluer. La ligne de parti a l'effet toujours pervers de limiter la démocratie.

Les apports de la discussion sur le Web

Il n'empêche que je crois qu'il est important d'avoir ces débats de société. La venue du Web permet maintenant de discuter avec différents interlocuteurs œuvrant dans différents milieux.  Ces échanges me semblent permettre de faire mûrir le débat dans bien des domaines. On partage beaucoup d'informations aussi dans tous ces échanges et des points de vue qui nous poussent à élargir nos perspectives. Même si je succombe souvent au réflexe guerrier et à ma frustration des dernières années, j'en viens ces derniers temps à rechercher de plus en plus comment trouver une façon de réconcilier les écarts entre différentes positions qui en ce moment campent beaucoup les débats. Ainsi, je pousse peu à peu, enfin je tente, ma réflexion dans une perspective nouvelle pour rechercher une nouvelle vision pédagogique pour notre école. Mais bon, je suis dans une phase franchement ambivalente encore. D'un côté, je ne crois pas en cette réforme qui structure trop la façon de faire l'école dans une direction qui a montré beaucoup de faiblesses. De l'autre, je crois que certaines de ces idées ont leur valeur dans certaines circonstances. L'aspect intégrateur d'un projet en coiffe d'un processus patient et adroit d'acquisitions est pour moi un objectif vraiment intéressant. Avec des élèves doués, je crois que l'on peut assez bien faire dans une pédagogie de projets, mais bon, je crois qu'il ne faut jamais perdre de vue que le jeune a besoin d'être outillé et de développer ses outils pour bien faire dans un contexte d'intégration des apprentissages.

Enfin, pour moi, ma motivation première à tenir un carnet est celui de me permettre de développer une pensée sur la pratique que je vis au quotidien et de m'approprier les lectures que je fais pour bonifier ma compréhension de la problématique éducative. Je pourrais tenir un journal pour moi-même, mais la discipline du carnet public impose justement un approfondissement de la réflexion en s'obligeant une certaine présentation en respect de certains critères de communication. En plus, bien je me dis que mon travail de réflexion peut être utile à d'autres ou me permettre d'entrer en relation avec d'autres perspectives et informations pour continuer mon processus de compréhension et d'amélioration de ma pratique d'enseignant. Souvent, à la blague, je dis que je me fais mon programme autodidacte de maîtrise en éducation.

L'homme voit souvent la réalité en fonction de son intérêt

Le départ de Charles Samares me pousse à réfléchir à mon exposition sociale. Je crois qu'il faut faire attention à certains pouvoirs et aux personnes. En même temps, il est souvent important de questionner ce pouvoir tant il a prouvé dans le passé des hommes que la vérité (ce qui est conforme à l'expérience du réel) n'avait pas intérêt à être dévoilée à la face de tous. Enfin, beaucoup de gens ne se rendent pas toujours compte des limites de leur perspective, moi le premier. L'échange de vue permet au  moins un dialogue entre différents groupes d'intérêt.

J'ai toujours du mal avec la langue de bois et les pensées en conserve. Je crois que je ne peux me fermer la boîte au sujet de certaines positions. Je ne peux m'empêcher de me représenter un peu des acteurs derrière le système d'idées que je reconnais en face de moi. L'homme a souvent tendance à voir la réalité en fonction de son intérêt. Et si on ne lui rappelle pas que les autres ont parfois des intérêts divergents ou qu'ils subissent un peu cette vision intéressée trop dominante, il peut s'illusionner longtemps d'être dans son droit ou dans la vérité partielle qui est la sienne. Je voyais ce dirigeant d'entreprise en France qui a eu des indemnités de départ de près d'une dizaine de millions d'Euros et je me disais que franchement, tant que le peuple parfois n'en arrive pas aux coups, les privilégiés ont le champ libre de puiser sans balise leur richesse et leur confort à même la richesse collectivement produite.

De la succession des idéologie: anonymes de l'histoire et transformations sociales


Évidemment, en éducation, les enjeux sont peut-être moins spectaculaires que les enjeux sociaux et mondiaux. Mais bon, l'école demeure une institution fondamentale dans la transmission du bagage humain. N'empêche qu'en ce moment, une vision de l'école prédomine et on voit les signes manifestes d'une tentative d'auto-préservation du système. Bloguer anonymement dans ce contexte apparaît un moyen de permettre tout de même d'exprimer ou de développer des visions nouvelles que l'école a besoin pour prendre pleinement son essor dans le 21e siècle. La vision n'a pas besoin d'un auteur en particulier. Si elle est le fruit de collaborations anonymes comme un wikipédia qui n'a plus à prouver son utilité, cette vision pourra peut-être trouver le moyen de s'affirmer au bénéfice d'une meilleure évolution humaine.

L'homme ne peut s'empêcher de créer et aussi de cristalliser dans des systèmes de pensée la forme provisoire de l'état des acquisitions ou des nouveaux modèles en exploration. Chaque système de pensée propose une vision du faire collectif qui génère sa dose de conflits sociaux, psychologiques, cognitifs. Ainsi, dans la résolution de ces conflits doucement l'humanité évolue ou se vit autrement. Au regard de la succession des différentes idéologies qui poussent les hommes à faire ensemble et évoluer ensemble, nous sommes tous des anonymes acteurs qui, chacun à leur manière, jouent leurs rôles.

En terminant, vivre comme organisme, c'est gérer son intégrité et ses relations avec l'environnement

Il est clair que la transformation de la facilité de communiquer des informations aujourd'hui rend tout plus transparent et perméable. Le vivant a toujours eu quelque part le souci de préserver ses limites des attaques de l'extérieur tout en continuant de transiger avec cette extérieur pour s'en nourrir et s'y adapter. Les organismes plus complexes que sont les regroupements, les institutions, les systèmes ont les mêmes enjeux de survie. Dans cette révolution de l'information, tous les acteurs, des personnes aux gouvernements doivent apprendre de nouvelles façons de gérer leurs intégrités sous peine de dislocation et leur interaction avec l'environnement sous peine de tomber en désuétude ou mort sociale. En ce moment, c'est le lab à ciel ouvert, tout virtuel qu'il soit!

Comme tout le monde, je cherche le meilleur équilibre dans ce contexte entre mon besoin d'intégrité et mon besoin de relation avec l'environnement. Je ne saurais donc que recommander de faire attention à vous, chers amis blogueurs, dans cette expression nouvelle de la vie qui nous est offerte. Il faut faire gaffe de trop s'emmêler (s'en mêler?) dans la toile! L'araignée de la Toile, telle est l'image qui me vient, demande un certain respect.

En regard de cette préoccupation pour l'intégrité des individus face à la Toile, je n'ai pas encore de positions sur la question de savoir s'il faut ou non protéger les enfants malgré eux  contre une exposition susceptible de  nuire à leur intégrité. Il m'apparaît clair qu'il faille s'en préoccuper.

Seul, sur son ordi, à s'exprimer sur ces préoccupations intimes, on peut oublier facilement que la fenêtre est grande ouverte sur le monde et que notre action peut être utilisée un jour contre nous.

Dans 50 ans, que restera-t-il de la mode Facebook, de la mode Twitter, de la pratique des carnets électroniques? Bien malin, qui nous le dira. En tout cas, il est prévisible que les institutions vont dans les prochaines années exercer certaines pressions pour mieux contrôler la diffusion des informations dans un certain souci de préserver leur intégrité. La France a déjà un plan pour 2012 qui fait beaucoup jaser depuis quelques mois. Je crois qu'on a pas fini de débattre des devoirs de réserve versus la liberté d'expression.

samedi 27 mars 2010

L'induction, trouvez-vous que ça marche?

Vous connaissez sûrement ce petit mécanisme pour présenter de la matière ou pour enseigner une règle à suivre. Nos manuels sont inondés de ce genre de présentations astucieuses... À partir d'un échantillon de cas choisis, on espère faire découvrir la règle. On suppose qu'il est bien mieux, évidemment de découvrir une règle pour s'en souvenir après. En théorie, mais qu'en est-il de la pratique?

Quand j'ai lu dans mes cours d'éducation cette petite distinction entre le processus inductif et le processus déductif qui présente la règle, l'explique et l'illustre d'exemples et de contre-exemples, j'ai trouvé l'approche inductive astucieuse et j'ai adhéré à la suggestion que l'induction était préférable à la déduction. Puis, j'ai enseigné et ai reconnu dans plein de manuels et de cahiers d'exercices le processus inductif que j'ai tenté d'utiliser.

A l'usage, j'en suis venu à la conclusion que le processus inductif est inefficace et fait perdre plus de temps qu'il ne permet d'en gagner. Après la confusion peu rassurante que provoque cette recherche d'un principe dans un ensemble de cas présentés, les élèves sont en plus moins réceptifs à l'écoute de la règle avec attention. Enfin, ça allonge la présentation. Quand on sait que la capacité d'attention des jeunes d'aujourd'hui n'est pas très longue...


 Hier encore, je notais qu'il est bien de connaître la règle pour voir ce que la mise en situation veut nous faire découvrir. 99% du temps, j'observe un jeune en état de confusion  se demander franchement ce qu'il  faut comprendre de ces exemples choisis quand il ne connaît pas la règle. Hier on faisait faire avec la calculatrice dans un cahier pour adultes plusieurs comparaisons pour amener à induire la règle:
4-(-5)=                 4+5=  
10-(-8)=                10+8=
(...)                          (...)

Avec une petite question du style: qu'observez-vous?

Pour moi, c'est une belle idée qui ne marche pas. Induire un principe dans un échantillon de réalité suppose déjà la connaissance d'un principe au moins voisin ou connu dans un contexte semblable qu'on découvre présent dans divers échantillons de réalité qu'on cherche à systématiser. Voir dans un ensemble complexe des similitudes suppose souvent qu'on connaît le point de comparaison au moins un peu... On reconnaît ce qu'on connaît. C'est un processus que peut se permettre un analyste qui a de l'expérience, mais qui a peu de chance de réussir chez un apprenant novice dont la pratique de l'analyse est encore limitée, dont les connaissances générales sont en construction.

Et vous? Vous trouvez cette approche productive? Je pose la question.

jeudi 25 mars 2010

Le conflit cognitif: le provoquer ou l'éviter? Ou pourquoi beaucoup de profs et d'élèves perdent leur temps!

Je réfléchis ici à ce concept. Je ne suis pas un spécialiste de Piaget d'où il nous vient. Non, j'ai été initié à sa théorie il y a longtemps dans mes cours de psychologie, car c'est un théoricien marquant et incontournable dans l'histoire de la compréhension du développement de l'intelligence.

En bref, Piaget, l'idée du conflit cognitif et le constructivisme de la réforme

C'est généralement de sa théorie constructiviste qu'émane ce concept pour comprendre l'aspect dynamique de sa théorie du développement de l'intelligence. Au cours de ses études de cas de quelques enfants dont les siens, Piaget est amené à formuler une théorie de développement en stades progressifs, caractérisés par diverses opérations cognitives qui vont être peu à peu développées par l'enfant dans l'interaction avec son environnement physique et sociale.

Bon, je ne veux pas refaire la théorie de Piaget, mais m'arrêter à un de ces concepts que les socio-contructivistes ont repris à leur compte et qui, dans le cadre de leur théorie, m'apparaît être dénaturé, voire complètement détourné de son sens. Et ce détournement ou cette profonde incompréhension est à la source des déboires de l'approche sociocontructive auprès des élèves réguliers et de  ceux en difficulté d'apprentissage. Pire, je dirais que le manque de prise en compte de cette réalité dans le processus visant à développer des compétences dans des contextes signifiants est à la source de beaucoup de perte de temps en enseignement (les jeunes n'apprennent pas ou ne retiennent pas) et provoque une démotivation devant des tâches trop complexes. La pédagogie de projet et celle de la découverte manque donc à mon sens de considération envers une réalité de l'esprit sur laquelle on aurait avantage à se documenter. L'enseignement explicite est l'approche moderne qui s'attache par tous les moyens à contrer l'effet négatif sinon salvateur du conflit cognitif qu'il vaut mieux apprendre à doser avec tout le support et l'attention que cela implique.
 

Le concept de conflit cognitif parle simplement du fait que l'enfant se retrouve parfois devant des situations qui exigent de lui d'aller au delà  de son fonctionnement jusque-là acquis au plan cognitif. Plus vif ou saillant est le conflit cognitif, selon des recherches, plus l'appareil intellectuel est poussé à se réorganiser pour développer une réponse (accommodation) appropriée à la situation stressante. Puis, à force de répéter l'expérience, l'appareil intellectuel va assimiler le nouveau paradigme, la nouvelle connaissance. Bon, généralement, ce genre d'observation a été faite dans des contextes somme toute assez simples, en fait peu propice à mettre l'enfant en dépression en développant un sentiment d'impuissance face à la tâche ou plus modérément d'évitement protecteur (démotivation). Non, on a observé cette réalité souvent dans des petits contextes mignons comme des expériences sur la conservation des quantités. L'enfant, qui n'a pas intégré certaines informations encore, peut faire des erreurs d'appréciations s'il n'apprend pas à tenir compte de certains aspects importants pour l'évaluation de différentes quantités d'eau dans des récipients de différentes formes. Généralement, on confronte en fait l'enfant à la réalité de son erreur en expérimentant. Par exemple, quand on prend deux verres d'eau de formes différentes, il est facile d'induire une illusion: celui qui est plus haut et effilé aura l'air d'en contenir plus qu'un  récipient trapu. Si on fait transvider les contenus dans des cylindres identiques pour une meilleure appréciation, le jeune peut alors être contraint d'admettre qu'il a fait une erreur d'appréciation. Puis, on lui donne des informations supplémentaires de compréhension pour permettre de saisir les nouveaux paramètres à tenir compte comme l'idée du volume pour arriver à une meilleure évaluation des quantités.

Bref, rien  de traumatisant. Encore qu'il faille qu'il ait atteint un certain âge pour être capable d'intégrer cette conservation des quantités.

Bref, ce concept a justifié le mouvement socio-contructif de postuler que l'immersion d'un jeune dans une situation problématique le poussant à vivre un conflit cognitif allaient finalement l'amener à apprendre, d'où on découle la pédagogie de projet avec immersion dans des situations complexes.

Un autre son de cloche: les recherches en Direct instruction (enseignement explicite)

Or, la recherche expérimentale comme en témoignent de très nombreuses revues de littérature montre justement que l'apprentissage doit plutôt tenir compte de la capacité limitée de l'appareil cognitif de traiter de l'information nouvelle. En fait, il semble que des séquences avec unités simples adroitement agencés en passant du simple au complexe avec maîtrise de chaque étape permet davantage de bâtir ou construire des apprentissages solides. Des approches très structurées comme le Direct instruction (ou enseignement explicite) ont montré dans de très nombreuses études une supériorité manifeste sur toutes les approches de découverte de type socio-constructiviste à pédagogie de projet. La modèle pédagogique de l'enseignement explicite est assez simple: Modelage (démonstration, explications),Pratiques dirigées (mise en pratique ou exercice du modèle souvent en équipe), puis Pratique autonome (L'élève qui sait comment faire met en pratique par lui-même).

Dans cette approche, on se soucie de faire des petites unités de présentations, en partant des connaissances antérieures, qu'on va réactiver, et ré-enseigner s'il le faut, en laissant même le temps de reposer un peu pour ne jamais surcharger la capacité de la mémoire de travail. Car, on sait qu'une surcharge ne favorise jamais une mise en mémoire à long terme. On travaille aussi finalement avec la réalité biologique du cerveau. Quand on apprend, le cerveau réorganise le réseau neuronal et cela se complète souvent dans le sommeil. Bref, il est bien de ne pas surcharger et de séparer la tâche et d'ajourner même au lieu de vouloir trop donner d'informations à la fois. (Je note souvent chez mes collègues cette réflexion redondante: «Je ne comprends pas, j'ai enseigné tout cela et ils ne se souviennent de rien.»  La surcharge de l'enseignement, l'exhaustivité des présentations, des livres, des manuels, le manque d'attention aux préalables, le manque d'exercices permettant l'acquisition, tout cela serait à explorer. Mais la mode à l'exhaustivité universitaire déversée dans le  primaire et le secondaire sans mentor pour rappeler à l'ordre les gens qui commettent ces erreurs évitables, est selon moi à la source de beaucoup de gaspillage de temps d'enseignement aux conséquences inconcevables.)

S'il ne faut pas surcharger l'esprit de nouvelles informations, est-ce à dire qu'on va négliger l'acquisition d'apprentissages complexes? Absolument pas, dans les approches explicites, on s'occupe des connaissances déclaratives (quoi faire), procédurales (comment?) et conditionnelles (quand?), mais toujours dans un souci d'enseigner en rendant les stratégies explicites en montrant en action comment faire et toujours en morcelant le contenu et en donnant le temps aux apprenants d'intégrer l'information.

On remarquera que, dans ces approches, on semble s'attacher justement à susciter le moins de conflits possibles. On fournit en fait beaucoup d'informations, mais à petites doses. D'ailleurs, on fait remarquer que de plonger l'enfant dans un apprentissage s'il n'a pas les préalables peut le plonger dans un sentiment d'impuissance et générer une démotivation importante. Aussi, la phase de mise en situation ou de préparation à l'apprentissage, avec la réactivation des préalables, ré-enseignement si nécessaire jusqu'à maîtrise est une prescription sur laquelle on insiste dans ces approches. Avec même, des mises en garde: donner un peu de temps entre le réenseignement des préalables et les nouveaux enseignements pour permettre à l'apprenant d'intégrer et ne pas surcharger la mémoire de travail, qui sans cette précaution ne va pas bien mettre en mémoire à long terme les nouveaux contenus appris.

La surcharge est contreproductive, qu'on se le dise!

Provoquer ou éviter le conflit cognitif?

Il est curieux de constater une telle divergence dans la vision de l'enseignement autour de cette notion aussi importante et me vient donc cette question: doit-on provoquer ou éviter le conflit cognitif?

Si l'on en croit la revue de littérature  de Bissonnette, Richard et Gautier (2006), " L'une des conséquences [de l'existence de hiérarchies d'apprentissage et de séquences d'acquisitions] est la mise en place de séquences d'enseignement respectant le principe du simple au complexe. Comme le soulignent, Péladeau et collaborateurs (2005), l'efficacité d'une telle séquence a été démontrée à de nombreuses reprises (Anderson, 1968; Caruso et Resnick, 1971; Resnik, Siegel et Kresh, 1971; Mattoon, 1992; Scandura, 1966). Toutefois, «Dans une recension des études empiriques sur le transfert, Baldwin et Ford (1988) concluent qu'une méthode d'enseignement globale à partir de mises en situation complexes peut s'avérer avantageuse uniquement si le niveau d'aptitude de l'ensemble des apprenants est élevé et si le niveau de complexité de la tâche est faible» (Péladeau, Forget et Gagné, 2005, page 22, )." (les gras sont de Bissonnette et al., p.106).

Dans cette revue, on souligne également la supériorité fort documenté de la Direct instruction (DI) sur les pédagogies de découverte utilisant des contextes complexes comme mise en situation, la baisse de la performance du Québec au TEIMS entre 1995 et 2003 pour questionner les prétentions de la réforme, ainsi que l'étude de Théorêt et Al. (2005) dans le Projet Transmaths où on a relevé même des signes clairs de régression dans les apprentissages au terme d'une année de projet.

Au vu de ces résultats, il y a à se questionner sur la pertinence de susciter des conflits cognitifs pour stimuler l'apprentissage et même la motivation à l'apprentissage, car, comme on le note chez les chercheurs, se confronter à une tâche qui dépasse nos capacités peut conduire à un sentiment d'impuissance et à une certaine démotivation.

Cherchez l'erreur?

Au début de ma carrière, j'ai commencé dans le monde des difficultés d'apprentissage dans une école spécialisée. Là, je me souviens, on discutait de la notion de conflits cognitifs et vu que j'intervenais en secondaire 3, il en a été question dans des discussions que j'ai eues avec mes mentors de l'époque. En effet, j'ai remarqué chez certains élèves de drôles de changements dans la période des fêtes notamment une année. Alors que ces élèves demandaient beaucoup de support avant les fêtes, j'avais noté un changement complet de disposition face à certains apprentissages cet hiver-là. Évidemment, l'algèbre en math représente un changement de niveau cognitif de représentation et de certaines habitudes à gérer avec méthodes pour éviter les erreurs de calculs. On a parlé maturation de l'appareil intellectuel et de saut qualitatif qu'aurait créé la répétition d'activités d'un niveau cognitif différent pour expliquer ce changement tout à fait notable. Souvent, on me disait quelque chose comme; « Continue de l'aider, un moment donné, la pâte va lever! Faut que ça mature.»

Cette école avait tout à fait un design curriculaire et pédagogique pensé en fonction des objectifs de fin de parcours du secondaire avec une claire idée des idées maîtresses à «prioriser» pour cette population d'élèves en difficulté avec un lourd passé. C'est de ça qu'on parlait en réunion de matière: de la progression à suivre, des objectifs à atteindre à chaque niveau. Pas de port-folio des réalisations ou des lectures.

En français notamment, chaque discours avait favorisé l'enseignement d'une structure qui préparait aux textes argumentatifs. On modelait, on faisait beaucoup de pratiques, l'utilisation d'organisateurs de pensée étaient une évidence. L'enseignement explicite ou DI était au cœur de la pensée de ces innovateurs dont je garde une claire admiration même si je me souviens pas qu'on évoquait cette approche. Et ça marchait bien sans en faire des élèves exceptionnels, mais simplement des élèves capables d'empocher un DES, eux qui avaient souvent été tous été classés en trouble grave d'apprentissage.

Mais bon, on ne passait pas notre temps à susciter le conflit. Non, en fait, on apportait beaucoup de support, on cherchait avec l'élève, on avait le contexte (15 élèves par classe max), les stratégies les plus susceptibles d'améliorer leur performance en écriture et en lecture. En math, on cherchait les stratégies les plus efficaces pour les enseigner et les faire pratiquer en fonction de leur besoin en fonction de la personnalité du jeune. On ne met pas une stratégie séquentielle à pu finir ou maniaque dans les mains d'un hyperactif mental. Non, on simplifie plutôt la séquence au max. On le contraint à quelques étapes simples. (je me permets une digression  reliée: J'en ai-tu vu moi des démarches longues de matantes choses sorties de l'université qui se retrouvent dans des agendas d'école depuis que je suis sorti de cette école spécialisée? Oh que oui! C'est possiblement juste imbéciles! Mais probablement de l'inconscience pure! Est-on efficace d'offrir ce genre d'outil quand un élève ne comprend pas le trois quarts de mots de la dite démarche ou que l'élève n'a que hâte de terminer sa tâche pour en finir et qu'il saute donc au moins le 3/4 des des 18 étapes de correction de la démarche, et ça, c'est s'il daigne même la lire. Et en terminant, les petits crayons de toutes les couleurs dans l'esprit d'un petit gars, c'est pas toujours cool!).

Je crois qu'il faut développer le concept de l'épuration pédagogique. Il faut trucider le réflexe mal venu d'exhaustivité pour les enfants. La maîtrise est le propre des études supérieures, on peut-tu s'entendre sur ça?!!!

Bref, on cultivait les présentations dépouillées, les organisateurs de pensée simples. Des listes de routines ou de vérification épurées au maximum. On répétait milles fois des expressions simples déclencheurs pour permettre d'activer les stratégies au besoin en situation. Et on exerçait, exerçait, dans tous les niveaux de complexité.

A mon sens, et voilà un début de réponse, le conflit cognitif ne venaient pas d'une stratégie délibérée d'enseignement, mais bien des exigences de la tâche qui, d'année en année, augmentent jusqu'à des points de changements majeurs. Conscient de la description piagétienne du passage des stades opératoires concrets à la pensée formelle, j'ai toujours eu l'impression dans ces niveaux de sec.2 et sec.3 qu'il y avait une augmentation significative de la complexité dont les anciens programmes qui ne me semblaient pas trop mal foutu tenait compte dans un curriculum stratégique. J'enseignais plusieurs matières et j'étais fasciné par les ponts prévus entre les matières: en français, nous abordions le vocabulaire expressif (sentiment, émotion), mais aussi dans le conte où l'on s'attaquait aux mobiles et aux caractères des personnages à l'époque (sans compter l'inconcevable révélateur de dynamique intime que fait ressortir l'écriture de contes de fée) qui s'attaquait à la dimension psychologique de l'être. En même temps, je pouvais m'appuyer sur le cours de morale qui aussi s'attaquait à la relation de soi aux autres dans une ouverture à la réalité psychologique. Évidemment, on changeait pas mal la façon d'appréhender l'être héros d'aventure dans un univers réaliste pour passer au personnage fantaisiste qu'on devait cerner dans ses mobiles pour ne pas finalement créer des invraisemblances même dans des mondes merveilleux. J'insistais donc, ayant en vue aussi que je préparais les jeunes au niveau supérieur où retrouvant le réel dans la nouvelle littéraire, on devrait en plus s'appliquer à narrer une transformation psychologique. Évidemment, quand on sait que l'ado à ces âges explorent le concept d'identité à la recherche d'une vision de lui -même dans ce monde, on sent une certaine cohérence des programmes avec le développement de l'enfant.

Franchement, quand j'ai vu disparaître le texte expressif, qui préfigure une structure argumentative moins rigoureuses, plus vendeuses quoi, je me suis demandé ce que le texte explicatif allait bien nous apporter de mieux. Je cherche encore. Ce que j'ai trouvé, plus tard, et c'est mon interprétation est que la structure de l'explication argumentative est franchement plus obscure et difficile à évaluer, tout à fait complexe, trop en finesse (au point que je me demande qui comprend bien ce genre, je me suis pris dans de grandes discussions sur la question avec une soi-disant journaliste devenue prof (prof masqué n'a aucun rapport avec cette personne); dans les manuels, la structure cause-conséquence-recommandation comme j'en suis venu à la simplifier est souvent un embrouillamini qui se contredit trop pour facilement être enseigné en modèle à des groupes du réguliers! Pour cacher des défauts au nom d'intérêt supérieur, je trouve qu'on a bien manœuvré! Le genre analytique ou explicatif me semble un texte qu'on devrait réserver au Cégep ou à des élèves doués en secondaire 5. Le genre demandent une capacité de se représenter le destinataire à qui l'on explique et de maîtriser une représentation du monde en structure causale qui n'est pas encore très mûre. Mais bon avec de bons élèves, on peut toujours y arriver en autant qu'on a des manuels pas trop tartes qui créent de la confusion.

Et si respecter l'enfant était...

De cette appréciation un peu complaisante, j'en reviens à la notion de conflits cognitifs. Pour moi, il est clair qu'on devrait présenter aux élèves des tâches dans un processus allant du simple au complexe, en tenant justement compte aussi d'une observation de la vie tout à fait fondamentale. On présente à un enfant généralement des défis raisonnables pour son âge.

Tout parent un peu raisonnable sait qu'il vient un temps où chez certains enfants il faut pousser dans le derrière pour qu'il s'adonne à une tâche de leur âge. Ramasser ses jouets par exemple. Si à deux ans, vous chicanez votre enfant sur cette question, vous risquez de le traumatiser si on répète avec insistance la scène surtout si on s'attend à ce qu'il le fasse avec un résultat en ordre. Et ce, pour une raison simple: normalement à cette âge l'enfant n'a pas réussi à cognitivement gérer du classement. Mais bon à 5-6 ans, même si l'enfant ne semble pas très motivé de changer son confort de ne pas démêler lui-même ses jouets, il peut être propice de lui montrer comment faire, de le diriger, puis d'exiger qu'il autonomise sa tâche. Évidemment, il se peut que le tout se vive comme un conflit cognitif. Mais la maturation normale de l'enfant le rend prêt à cette confrontation et vous remarquerez que l'enseignement de la tâche est fortement indiquée.

Conclusion

On le voit, l'intelligence procède par palliers grosso modo. Évidemment, il y a de grandes variétés individuelles et des effets de contextes aussi. Se retrouver à 7 ans dans l'obligation de subvenir à ses besoins dans un contexte de guerre, peut créer chez certains jeunes des accélérations d'acquisition incroyables que des oeuvres et des témoignages ont révélé. On a parlé de résilience. Je dirais peut-être davantage du talent exceptionnel pour l'adaptation. Bien des enfants, dans pareilles situations, sans aide, seraient morts après être tombés dépressifs, dépassés par les événements.

On peut aussi montrer avec des astuces que Piaget avaient tort pour ceci ou cela. J'ai lu récemment que, dans des expériences raffinées, peut-être tirées par les cheveux, on est arrivé à «prouver» que des enfants ont le concept du nombre tout bébé, contredisant la théorie des stades. Je pense à cette expérience qui observe la surprise lue dans les yeux de l'enfant. Quand on lui présente après deux fois 1 nounours, 2 nounours, il ne s'étonne pas. Mais après deux fois un nounours, quand on en présente 3, ses yeux s'écarquillent. Personnellement, moi aussi je m'écarquille les yeux à lire ce genre de stupidités! On n'a pas essayé trois fois le nounours seul et ensuite 3 nounours pour voir. Pis non plus, il n'est venu à personne l'idée de rendre familier le bébé avec l'image de 3 nounours avant de faire l'expérience. Disons qu'on pourrait remarquer des choses surprenantes, enfin j'en ai l'intuition.  Bref, on peut bien insinuer l'idée que les apprentissages ne sont pas toujours absolument linéaires et par paliers et qu'il y a des différences individuelles, et probablement des effets de contextes plus ou moins stimulants ou des dispositions héréditaires, mais en gros, on ne s'attend pas à la capacité de faire du calcul différentiel et intégral à douze ans, même avec les meilleures pédagogues du monde. Et là, j'ai le goût de parler de tradition scolaire pour ce qui est du gros bon sens cognitif des aptitudes des jeunes. Il me semble qu'on aurait avantage à jeter un petit regard en arrière pour mieux avancer!

Bref, avant de plonger les jeunes dans la complexité du monde pour les y perdre, n'avons-nous pas le devoir de les y préparer un peu? Pour lire, on doit apprendre des grilles de compréhension, faire pratiquer des technique, faire intégrer la perception de différence entre des objets complexes comme des genres de textes. Comment sélectionner la forme pertinente d'expression si on ne les a pas un peu étudié au moins quelques-unes pour finalement comprendre un Guide du savoir écrire par soi-même au Cégep. L'école qui outille pour le monde moderne peut-elle se passer des modèles structurants et consistants? On ne peut pas bâtir une école qui fonctionne comme si tous les enfants étaient surdoués et nous faire balancer du «nivellement par le bas» quand on demande un retour au respect des capacités cognitives de l'enfant.


A mon sens, l'erreur de l'exhaustivité, l'immersion dans des contextes trop riches, continuels, à un âge trop jeune, l'utilisation de situation-problèmes trop complexes trop tôt dans la séquence d'apprentissage sont la  conséquence des conceptions erronées véhiculées par cette réforme et ses programmes. Et en bout ligne, nous sommes très nombreux à perdre notre temps et à le gaspiller dans des familles de situations trop complexes pour favoriser quelque apprentissage que ce soit.

La surcharge cognitive est contreproductive, qu'on se le dise!

mardi 23 mars 2010

Les perroquets peuvent-ils être professionnels?

L'autonomie professionnelle et progression des apprentissages.

Voilà longtemps que je réfléchis à la notion d'autonomie professionnelle. Et, à chaque fois, je me demande comment on peut être autonome dans un système qui travaille ensemble à un projet d'éducation. En comparaison, un médecin a certes une autonomie, comme un psychologue d'ailleurs et bien des professionnels, pour sélectionner les meilleurs traitements pour son client selon ses connaissances, mais jusqu'où va cette autonomie? A  mon sens, il y a toujours à mettre en balance un certain principe de validité, d'efficacité de l'action et aussi des principes éthiques. L'autonomie, bref, ce n'est pas la liberté totale ni faire n'importe quoi.

Au risque de faire du coq à l'âne, je note que récemment certains perroquets se sont mis à hurler de façon répétée de drôles de mots:« paplum», «perroquets», notamment. On a cru entendre aussi: «nivellement par le bas», «avancer par en arrière» (reculer? j'imagine sans trop d'imagination), «et monotonie»  (et mon autonomie?).

Tâchons d'y voir plus clair !

Ça brasse en ce moment en éducation. Peut-être pas autant qu'en santé qui fait le gros show en ce moment, mais bon, ça brasse. Les états d'âme se multiplient d'ailleurs comme des petits pains froids!

D'un côté, la négociation pour une nouvelle convention collective montre une volonté d'occuper notre temps encore plus et de rendre imputable de l'échec scolaire. Évidemment, personne n'est content. L'autonomie professionnelle en prend pour son rhume encore un peu plus. Ici, l'autonomie concerne à mon sens le besoin d'avoir du temps personnel pour gérer une partie de notre tâche professionnelle notamment dans la préparation des cours, dans la correction. La liste des tâches qu'on peut faire sans être à l'école pourrait être très longue, mais ce n'est pas mon propos ici.

De l'autre, la ministre essaie de décrire une progression des apprentissages en remettant dans la ligne de mire l'appropriation de connaissances perdue de vue dans les idéaux socio-construits. Bref, les pro-réformistes crient à l'école producteur de «perroquets» parce qu'on veut remettre pour préciser des objectifs plus clairs avec (ô horreur!) des mots comme: nommer, décrire, définir, expliquer, connaître qui implique parfois une mémorisation de contenus par les apprenants. «Nivellement par le bas» crient les réformistes. Intrusion dans l'autonomie professionnelle aussi. On va les empêcher de montrer (oups! à faire découvrir comment) à réfléchir, à critiquer, à juger, etc. Et ils vont être bassement obligé de montrer, faire apprendre, répéter, enseigner... Comme si enseigner pouvait se passer de ces actes importants dans la transmission du bagage culturel et du savoir utile. Ici, j'ai plutôt l'impression qu'on est indisposé parce qu'on va préciser ce qui doit être enseigné: des contenus qui niveau par niveau doivent être enseignés et évalués.

Et là,  je me demande franchement si certains ne veulent pas finalement qu'on ne puisse pas les rendre un peu imputable de ne pas avoir transmis certaines connaissances pourtant de base ou clairement au programme de l'année. Effectivement, si l'on précise des objectifs par niveau, clairs et évaluables, on ne pourra plus faire n'importe quoi en classe. Personnellement, je n'attends que cela que le ministère précise clairement le contenu notamment dans le programme de français au secondaire où s'est perdu depuis le programme du renouveau une fine description des objectifs à atteindre si ce n'est pas plus: une stratégie intelligente d'enseignement.

On se contente simplement de dire que les élèves doivent être compétents par exemple en lecture pour des textes de leur niveau. Wow!quel objectif! Le reste, c'est un liste de procédures ou stratégies complexes et déroutantes sans spécification de contenu ou types de discours à travailler. Dans ce tas de procédures maniaques (au 2e cycle, on atteint des sommets de délires), l'élève va sélectionner en écriture un modèle de texte pertinent en fonction de son projet, puis le réaliser en détail en tenant compte de dizaines de paramètres. Franchement, je ne vois pas comment enseigner cette potion imbuvable. Contrairement à l'approche organisée autour des discours en nombre limités (et progressive dans la difficulté) à pratiquer et comprendre, on n' a rien gagné pour mieux faire écrire nos jeunes avec ce programme de maniaques des stratégies sans objet ou des compétences transcendantales. Pourquoi faire simple quand on peut compliquer? Le «modeling» progressif semble un truc désuet et donc nivelant par le bas. Les collègues du cégep apprécieront!

Aussi, ce genre d'initiative fort  attendue de la ministre s'appelle aussi de l'alignement curriculaire. Hier, je relisais la revue de littérature de S. Bissonnette, M. Richard et de C. Gauthier, Comment enseigne-t-on dans les écoles efficaces? Efficacité des écoles et des réformes. Si vous avez un 25$, la lecture de ce livre me semble une formation nécessaire en soi pour tout enseignant qui se targue de vouloir être autonome professionnellement. Ou le début des arguments fondés en science pour une rébellion et même peut-être plus!

Imaginez-vous donc que la recherche montre que l'alignement curriculaire, qui indique pour chacun des niveaux d'enseignement les contenus d'apprentissage à enseigner, peut expliquer «50% de la variance dans les résultats scolaires» (p.32). A l'inverse, de nombreuses études montrent les effets négatifs du non-alignement. C'est que quand il n'y a pas d'objectifs claires, précis et partagés par le corps professoral de nombreux contenus finissent pas ne pas être enseignés, ce qui aura des répercussions pour les apprentissages subséquents. A titre d'exemple parmi d'autres, on cite la recherche de Berliner (1984) qui montre dans un contexte de non-alignement qu'«au mieux, 30 % de la matière évaluée n'avaient jamais été enseigné et qu'au pire, 47% du matériel évalué n'avait pas fait l'objet d'une  présentation en classe» (p.33).

Je veux bien qu'on ait des états d'âme et qu'on veule de l'autonomie professionnelle, mais bon faire fi de certaines réalités claires de la recherche n'est pas à mon sens très professionnel. L'alignement curriculaire demande tout de même au prof de participer dans son niveau à une stratégie globale d'enseignement dans sa matière. Bref, s'il ne pose pas sa pierre dans l'édifice qu'on souhaite bien pensé par des didacticiens avisés, les collègues en aval vont hériter de ces manques et devront composer avec ces lacunes dans les préalables. Quand on se plaint des préalables fragiles des élèves sortant du primaire, c'est exactement de cela dont on parle. Pour le moment, je ne crois pas les profs soient vraiment en cause, mais plutôt les didacticiens responsables de ces programmes fascinants que nous a produit le ministère depuis 10 ans.

Quand je lis des profs faire de la poésie (la ministre veut faire des perroquets de nos jeunes) avec certains apprentissages de base qui demandent une certaine mémorisation, je me demande franchement ce qu'ils comprennent de l'apprentissage ou de la construction de l'appareil intellectuel. Pour mériter l'autonomie professionnel, il faut encore le mériter.

Quand je regarde tous ces commentateurs, même profs, de la scène de la blogosphère, continuer de colporter une idéologie de l'enseignement qui est invalidée par la recherche depuis plus d'un quart de siècle et qui est loin d'avoir donné des résultats sur le terrain, je me dis qu'il est grand temps qu'ils s'informent et arrêtent de faire d'eux des perroquets pleurnichards qui répètent sans intelligence un tas de conceptions erronées.

lundi 15 mars 2010

Autres pistes de compréhension des égarements de la réforme: pour gérer la charge cognitive des apprentissages

Françoise Appy me laisse en commentaire cette traduction de cet intéressant article de Sweller, un chercheur australien en cognition humaine pertinente à l'enseignement.

Sweller rapporte la distinction théorique fort éclairante de David C. Geary entre des apprentissages naturels et des apprentissages culturels (scolaires). Je me permets cette simplification des termes. En fait, on parle de la «distinction entre les connaissances biologiquement primaires, acquises au fil de notre évolution, et les connaissances biologiquement secondaires, culturellement importantes, transmises par les instances éducatives et que notre évolution ne nous a pas permis d’acquérir par des formes modulaires,  [qui ] est essentielle pour l’édifice pédagogique.»

Le manque de distinction entre ces deux types d'apprentissage auraient permis de nous faire adhérer à l'idée que les processus entre les apprentissages naturels (langues orales, marche, etc.) qui ne requièrent que peu d'aide et procèdent de processus assez inconscients sont les mêmes pour les apprentissages scolaires. Nos stratégies éducatives inefficaces avec certains élèves seraient dues au manque de naturel des stratégies scolaires. D'où l'insistance pour mettre l'élève dans une certaine liberté face aux apprentissages scolaires (socio-constructivisme). Or, c'est une grande erreur que, partout, l'observation courante dément. Les apprentissages culturels, qui s'acquièrent par l'effort conscient, demandent assistance et motivations externes. L'élève doit être appuyé et orienté puisque la stratégie d'essai et erreur des apprentissages naturels est insuffisante pour lui permettre de trouver le comportement adéquat ou de faire l'apprentissage. Il importerait donc de bien structurer nos enseignements en tenant compte des enjeux de mémorisation solide de contenus ou procédures antérieurs qui permettent de diminuer la charge cognitive des apprentissages de niveaux cognitifs supérieurs. Bien intégrer et automatiser des connaissances grammaticales antérieures permet leur gestion en situation d'écriture par exemple. La mémoire de travail limité de l'humain, qui est  fortement sollicitée dans les apprentissages culturels, a fait développer chez plusieurs chercheurs cette notion importante, d'une certaine évidence et fort éclairante de charge cognitive des apprentissages.

On réfléchit également dans ce texte sur le «par coeur» versus la «compréhension» qui ne mobiliserait pas de mémorisation. Or, on nous rappelle que même une «compréhension» doit être mémorisée pour être réutiliser plus tard. La différence tient au fait que la mémorisation de «compréhensions», faites de nombreuses notions interreliées, sollicite une plus grande charge cognitive et que plusieurs élèves se contentent de bêtement mémoriser par cœur, souvent parce qu'ils n'ont pas saisi la compréhension ou parce qu'ils peinent à gérer la charge cognitive de cet apprentissage. Enfin, dans le contexte des permissivités comportementales qu'on a renoncé à limiter, comment même en compréhension faire persister les apprentissages scolaires sans une bonne dose d'exposition et d'exercices attentifs de la matière à assimiler patiente construction guidée des savoirs. En fin de compte, en apprentissage culturel, on ne peut se passer du B-A-BA de la mémorisation, qui doit être stimulé par des stratégies propices essentiellement répétitives, entraînés et organisés. Il faut donc revoir le désaveu courant et englobant toute démarche de consolidation active du «par cœur» des tenants de la réforme.

A partir de cette notion de charge cognitive, on pourrait ramener les pendules à l'heure un peu. A mon sens, certaines personnes, pour toute sorte de raisons, biologiques ou culturelles (manque de préalables solides), ne peuvent envisager certains apprentissages fautes d'avoir, ou la capacité de gérer de grandes charges cognitives, ou les pré-requis nécessaires pour rendre son intégration ou apprentissage possible. Je peux témoigner de l'observation d'élèves fortement handicapés face à des apprentissages chargés cognitivement. Certains semblent incapables de se mesurer à certains apprentissages peu importe la vigueur des préalables. Le secondaire réussi pour tous est-il franchement un objectif réaliste? Ceci remet l'intégration et aussi le non redoublement en perspective, il me semble. Enfin, comment gérer, s'il faut s'en préoccuper en enseignement, ces différentes capacité de gérer des charges cognitives dans des classes hétérogènes? En laissant trop de jeunes dans un cheminement adapté ou différencié du curriculum commun en classe ordinaire sans issus n'économise-t-on pas sur leurs dos l'obligation sociale de développer pour eux des solutions d'intégration adaptées à leurs capacités? Franchement, ce déni de réalités pourtant mesurables depuis longtemps est une attitude irresponsable qui brise encore des vies en plus d'alourdir le système de classes devenues inefficaces à force de vouloir tout faire dans l'illusion de la différenciation ésotérique.

Enfin, je me demande à la lumière de ces vues si cette école fortement tournée vers l'acquisition de gestion mentale à très bas âge des apprentissages dans l'apprendre à apprendre n'est pas un manque de considération évident des limites de la charge cognitive que peuvent gérer des enfants. Cette systématique du complexe vers le simple est contraire à la dynamique propre aux apprentissages culturels. Il faut sortir des confusions avec les apprentissages naturels où, à cause d'une certaine hérédité biologique «préformante», on peut aborder comme enfant des tâches très complexes comme l'acquisition de la langue orale maternelle. N'oublions pas que certains animaux marchent en naissant.

Trop d'évidences d'expériences soit-disant réussies en éducation ne reposent-elles enfin sur des classes d'élèves sélectionnés, pour ne pas dire brillants, avec de très bonnes capacités de gérer mentalement des tâches aux charges cognitives lourdes? Ces biais de sélection des sujets ne nous permettent pas franchement, il me semble, de pouvoir généraliser la conclusion de ces recherches essentiellement descriptives à l'ensemble du réseau.

Mais bon, reconnaître une certaine évidence en en chiffrant les conséquences peut rendre aveugle  toute une classe de décideurs ou de vendus au système, oui oui, vendus au système ou à des intérêts corporatifs. Évidemment, clairement, je crois que l'école des années 80, avec son organisations issu d'une logique traditionnelle des apprentissages culturels,  avaient mis en place un système déjà intuitivement sur une meilleure voie qu'on s'est malheureusement acharné à déconstruire pour le profit des économies au nom de confusions malencontreuses.

En terminant, cette distinction pourrait aussi nous éclairer dans d'autres sens: certains apprentissages auraient peut-être plus à voir avec les processus naturels, et les enfermer donc dans la systémique scolaire des apprentissages scolaires serait alors tout à fait improductif... J'ai l'impression que l'expression corporel et artistique dans bien de leurs volets ont peu à gagner de stratégies propres aux apprentissages culturels.

samedi 13 mars 2010

Intégrer qu'ils disaient!

Variations sur un thème: l'intégration.

1-Intégration des élèves en difficulté

On fait grand tapage qu'il manquerait 1300 professionnels en éducation.

Ce ne doit pas dater d'hier! On raconte qu'un professionnel en congé de maternité n'est pas remplacé à la CSDM. Ce qui est bien avec l'information, c'est qu'on n'est pas toujours obligé de poser de questions et on respecte la nature du discours informatif! Je me demande donc pourquoi?

Évidemment, j'avais remarqué qu'il fallait être persistant pour obtenir une évaluation d'un jeune.

Bon, il est difficile pour moi de ne pas penser à la politique d'intégration des élèves en difficultés en classe ordinaire dans un tel contexte de pénurie de professionnels. On élimine depuis des années les classes d'adaptation scolaire où je crois qu'on en gérait pas mal avec des gens, qui sans être ces professionnels, avaient l'espace pour faire des interventions pertinentes et développer des expertises auprès des enfants en difficulté. Bon, dans la classe ordinaire de l'école publique devenue une sorte de salle des urgences, il est un peu difficile d'avoir un prof qui doit tout faire pour aider individuellement des cas lourds. Différenciation, pontifie les directions adjointes. Oui, oui, en même temps,  on n'a que deux bras, deux jambes, une tête...

2- Intégration des savoirs et de métaphores

Parlant d'intégration, je note aux passages d'une de mes lectures la réforme veut qu'on permette aux jeunes d'intégrer les savoirs. C'est à la mode l'intégration. Je ne suis pas contre, mais bon j'intègre ce que je comprends et ce que j'ai pu apprendre. Ainsi, un certain André «Renard» Roux serait sorti de son terrier pour refaire l'histoire de la réforme:
D’autres chercheurs qui possédaient une grande expertise dans l’approche socioconstructiviste ont pu démontrer que des pratiques qui mettent plus l’accent sur des apprentissages expérientiels que sur la transmission de contenus permettent aux élèves d’intégrer leurs savoirs au lieu de les oublier peu de temps après les avoir acquis. [Je mets l'italique].
Au risque de passer pour un des «beaux-frères-mal-renseignés-qui-ont-une-opinion-et-qui-détiennent-la-vérité-absolue-sur-tout » (ce sont les mots du renard), je trouve cette affirmation quelque peu présomptueuse. On attend toujours, je pense, la «démonstration» de la «grande expertise» de ces chercheurs dans l'approche socioconstructiviste.

Le texte intègre des métaphores qui nous éclairent sur l'impression qu'on les hérauts de la réforme d'être de nouveaux martyrs, mais attention ils sont «résilients», plein de courage!

Le titre a la couleur du texte: Le jour où l’on a voulu tuer Thélème - Réflexions sur un retour à l’eugénisme intellectuel. Curieusement, je découvre que l'Abbaye de Thélème décrite par Rabelais dans  Gargantua où l'on veut instituer un «Fais ce que voudras» développe une conception eugéniste: "Ici apparaît pour la première fois depuis l’Antiquité la notion d’« eugénisme ». Les pensionnaires de Thélème seront sélectionnés. Les femmes seront « belles, bien formées et bien naturées, les hommes beaux, bien formés et bien naturés »" (Abbaye de Thélème, Wikipédia). Bref, drôle de titre, le renard décale l'eugénisme de Thélème à l'eugénisme intellectuel, qui dans son esprit renvoie, on le suppose, aux traditionalistes qui veulent sélectionner les gens sur des bases intellectuelles. Je notais dernièrement, que l'esprit de la  réforme cependant se passait apparemment bien dans des écoles privées où l'on sélectionnait. Et que la contestation de la réforme la plus vive vient de l'école publique montréalaise prise dans l'impossibilité de sélectionner et les classes hétérogènes. Mais bon...

Rabelais opposait dans cette vision utopiste l'esprit d'une éducation monastique pleine de règles et de contraintes. Comme dans la réforme, toutes ces bonnes gens apprenaient dans la liberté ou le libre-arbitre. Le résultat était rien de moins qu'exceptionnel:

Ils étaient tant noblement instruits qu'il n'y avait parmi eux personne qui ne sût lire, écrire, chanter, jouer d'instruments harmonieux, parler cinq à six langues et en celles-ci composer, tant en vers qu'en prose. Jamais ne furent vus chevaliers si preux, si galants, si habiles à pied et à cheval, plus verts, mieux remuant, maniant mieux toutes les armes. Jamais ne furent vues dames si élégantes, si mignonnes, moins fâcheuses, plus doctes à la main, à l'aiguille, à tous les actes féminins honnêtes et libres, qu'étaient celles-là. Pour cette raison, quand le temps était venu pour l'un des habitants de cette abbaye d'en sortir, soit à la demande de ses parents, ou pour une autre cause, il emmenait une des dames, celle qui l'aurait pris pour son dévot, et ils étaient mariés ensemble; et ils avaient si bien vécu à Thélème en dévotion et amitié, qu'ils continuaient d'autant mieux dans le mariage; aussi s'aimaient-ils à la fin de leurs jours comme au premier de leurs noces.
                                                        Rabelais, Gargantua, Chapitre LVII


Bon, parler 5 à 6 langues et tout cela, sans règle aucune, me laissent songeur. Rabelais n'avaient pas appris à écrire à Thélème et devaient avoir, comme aujourd'hui certains, l'impression que l'apprentissage pouvait être plus facile que cet ordre contraignant.

3-Intégration des TIC

Pour moi, formation aux TIC, cette semaine. Bref, on a regardé naviguer la conseillère de sites en sites. On a pris des notes. On a copié des fichiers, papillonné des applications «cutes». Mais bon, voilà la formation. Après, l'intégration des TIC suppose des heures et des heures d'exploration des sites par l'enseignant pour voir comment articuler tout ça dans sa classe. Et franchement, quand je passe derrière, c'est pour me rendre compte trop souvent que le survol superficiel avec la conseillère montre finalement ce que sont beaucoup de ces sites, des survols souvent limités éparpillés aux 4 coins du Web. Pour un bout de celui-là, faudrait acheterun logiciel, pour celui-là, un abonnement élève, etc. Que de joies à découvrir! Pour faire changement, ou animer le TBI, ce tableau numérique si fabuleux, que je n'ai jamais vu encore en action parce que bon, la vie est ainsi, l'intégration suppose aussi bien des sous.

Plus ça change plus c'est pareil!

 J'en ai appris une bonne ce matin:

«L'adoption de l'écriture script dans les années 70 s'est faite sur des bases scientifiques faibles, dit Carole Fischer, de l'Université du Québec à Chicoutimi. On avait l'intuition que ça allait être mieux. Mais ce n'est peut-être pas le cas.»

Je ne savais franchement pas que l'enseignement de l'écriture script était aussi jeune dans l'histoire de l'école. Je note qu'on n'en est pas aux premières introductions d'une bonne intuition sans vraiment savoir si elle est bonne! Bref, 40 ans plus tard, on trouve là un sujet de recherche.

dimanche 7 mars 2010

Petite histoire tranquille de la prise de contrôle du système éducatif par les psychopédagogues et nouvelle grammaire

Je viens de terminer la lecture intéressante d'un article d'un enseignant d'histoire de l'UQAM, Julien Prud'homme: Réformer les programmes, réformer les maîtres qu'on peut lire dans le collectif Contre la réforme pédagogique (2008). J'ai compris peut-être enfin pourquoi la nouvelle grammaire est venue saboter mon métier. Le plan global était simple: nous couper de nos racines disciplinaires pour l'éclosion de l'école vue par les psychopédagogues.

L'auteur propose que la réforme éducative actuelle a des racines qui plongent loin dans le passé (Il n'est pas le seul, plusieurs témoignages corroborent cette vision des choses et le fameux livre de
Gosselin, G. et Lessard, C. (2007), même si ce n'était pas son intention, en aurait révélé de grands plans. Les deux principales réformes de l'éducation du Québec moderne : témoignages de ceux et celles qui les ont initiées. Québec : Presses de l'université Laval)

Avec la révolution tranquille et la création du MEQ dans les années 60, sont nés de nouvelles professions comme celle des conseillers pédagogiques et des psychopédagogues qui ont tranquillement mener leurs billes pour prendre de plus en plus de poids politique et finalement imposer leur vision de pédagogie à l'ensemble du système éducatif actuel. Dans le creuset des facultés des sciences de l'éducation, au MEQ et à travers des appareils influents comme le Conseil Supérieur de l'Éducation, tranquillement ce petit réseau a pu asseoir son pouvoir et mettre de l'avant ses idées et ses intérêts.

Un gros obstacle sur sa route: les enseignants spécialisés et les spécialistes des disciplines traditionnelles. Si les programmes des années 60 et ceux du début des années 80 sont largement écrits sous l'emprise de ces traditions comme le montre Julien Prud'homme, ceux fait dans les années 1990 et 2000 le sont maintenant sous l'emprise complète des psychopédagogues et dans leur perspective: l'éclatement des frontières disciplinaires et l'enseignement des processus d'apprentissage dans le paradigme socio-contructiviste.

C'est dans les années 1990 à la faveur du renouvellement du corps professoral que tous ces changements prendront d'ailleurs forme en dépit des États généraux dont on a détourné le mandat originel de M. Garon qui ne devait que poser des questions à la population sur des lignes générales. Il n'était nullement question à l'époque d'un grand remaniement pédagogique. A la faveur d'un remaniement ministériel, on aurait ainsi profité des circonstances pour transformer le mandat de la commission. La plupart des commissaires, choisis pour leur représentativité de la société, se sont donc trouvé de facto incompétents en cette matière, ce qui a donné tout l'espace à Bisaillon et Inchauspé pour mener le bal. Pour des gens qui ne voulaient pas d'États généraux, on avait adroitement manœuvré pour non seulement poursuivre le plan, mais pour lui donner un semblant de caution populaire. Des commissaires ont témoigné avoir été manipulée. André Caillé: «pour les commissaires qui s'y connaissaient en éducation, la consultation n'a eu d'autre effet [...] que de raffermir certaines convictions de départ». Céline Saint-Pierre: «Cela ne vient pas de nous [...]. Cela ne vient pas des États généraux [...]. Nous n'avons pas établi de compétences attendues, encore moins proposé que l'évaluation porte sur l'acquisition de compétences». (p.131, tiré de Gosselin et Lessard (2007)).

On remarque que dès 1994, on change complètement le cadre de la formation des maîtres pour la rendre plus orientée vers l'enseignement de la pédagogie au détriment de la spécialisation disciplinaire. Dans ce creuset, on formera plein d'enseignants dans la nouvelle pensée qu'on veut donner à l'école: développer des compétences transversales dans une pédagogie de projet. Les facultés de l'éducation avaient manifestement intérêt à profiter de l'occasion pour s'agrandir. "Comme l'indique rétrospectivement Claude Lessard, à l'époque doyen de la Faculté des sciences de l'éducation de l'Université de Montréal, «si nous ne changions pas les programmes [de formation des maîtres] dans un court laps de temps, les jeux auraient été faits pour les vingt-cinq prochaines années»" (Julien Prud'homme, 2008 dans Contre la réforme, p.142 qui la tient de la lecture de Tardif. et al. (dir.), Formation des maîtres et contextes sociaux. PUF, 1998, p.115).

En forçant, les nouveaux enseignants du secondaire à devenir des généralistes, on a réussi du coup à affaiblir le rapport de forces des différentes disciplines dans la revendication de leur place à l'école et de leur intégrité disciplinaire dans l'enseignement. Maintenant, les disciplines sont au service de domaines plus généraux (univers social, éducation à la citoyenneté, etc.)  et les psychopédagogues ont plus de liberté d'orchestrer l'écriture de l'ensemble des programmes, dans la mesure où toute l'école a été soumise à leurs conceptions.

J'ai compris en lisant ce texte ce matin, comme une révélation, que la nouvelle grammaire a été dans tout cela un moyen fort commode de couper les profs de français issus d'une tradition disciplinaire encore en place de leur savoir disciplinaire et donc de les déstabiliser suffisamment pour ouvrir toute grande, sans trop de contestation, la porte à leurs idées novatrices.

Or, pour enseigner, il faut un minimum de maîtrise de l'objet d'enseignement. Peut-être que tout commence là: en minant nos savoirs, on a affaibli nos assises et depuis nous galérons dans un paradigme dans lequel nous n'avons jamais baigné, qui n'a aucune légitimité si ce n'est que politique. Elle n'a même pas de précédents historiques valables pour se justifier. Elle est le fruit de l'excroissance sans résistance d'une frange de l'éducation, la psychopédagogie qui a profité de sa position centrale pour incorporer et dissoudre les autres acteurs de la scène de l'enseignement. Partout, dans les pays, où ont éclos les sciences de l'éducation, cette tendance s'est affirmée jusqu'aux exagérations que l'on connaît.

Je termine ce petit billet avec la conclusion de Julien Prud'homme qui mérite d'être appréciée : «Et ces individus liés au Ministère, au CSE, aux facultés universitaires, s'ils ne conspirent pas n'en sont pas pour autant des électrons libres (Qui l'est): ils véhiculent du groupe, du réseau auquel ils appartiennent, celui de la psychopédagogie qui ne trouvera sa place au soleil qu'en déracinant l'enseignement de son assise dans le savoir. Politiquement motivé, mis en place par des acteurs politiques usant de moyens politiques , ce projet, et c'est la moindre des choses, est aujourd'hui justement soumisà une critique publique à laquelle ses promoteurs ne devraient pas dédaigner de répondre franchement, comme il est attendu de toute entreprise politique.»

Je repense à la question d'un certain de ces individus sur le blogue du Raeq:« Vraiment, que ceux qui ont enfin trouvé un meilleur plan que celui que l'on s'est donné en 1997-1998, se lèvent et parlent!» Franchement, quand on comprend que ce plan n'est absolument pas issu des États généraux, mais d'un détournement de ceux-ci qui a permis à Bisaillon et Inchauspé de passer les idées de la gang comme dans du beurre, on se demande franchement si l'invite est de bonne foi!

Comme je l'ai dit ailleurs, mon plan est simple: qu'ils battent les pattes sans trop faire d'histoires et maintenant qu'on redonne la place qui convient à la transmission des savoirs dans l'enseignement. Il fallait être franchement prétentieux pour ainsi croire qu'on pouvait balayer la tradition scolaire sans créer d'immenses perturbations dont on est franchement loin de s'être remis. Quel gâchis!

samedi 6 mars 2010

La solution qui me faTIC (2)- L'étude de l'école privée Saint-Joseph

J'étudie patiemment les fameuses études que M. Asselin m'a envoyées pour soutenir le nouveau paradigme de l'apprentissage que nous devrions mettre en œuvre dans nos classes sous l'ère de la réforme et du renouveau qui dure depuis 10 ans.

Regarder attentivement ces documents et leurs implications demande pas mal de temps. J'ai fait hier le tour d'une première étude que je commente dans les commentaires de mon essai du 1er mars. Je termine aujourd'hui un tour attentif de cette étude à laquelle Monsieur Asselin a participé à titre de directeur, si je ne me trompe pas. J'ai passé un gros 4 heures à lire et à noter bien des choses. Si ça vous amuse, voici le lien.

A fouiller donc, il y a de nombreux problèmes ici encore pour penser que l'application d'une solution à tous les contextes du système scolaire québécois puisse avoir des chances de succès.

Je mets ici le résumé de l'étude pour se faire une idée avant de la passer en revue sous un regard analytique.

Résumé:

«La présente recherche propose un portrait ethnographique de l’activité de transformation de l’environnement d’apprentissage d’une classe de 3e cycle du primaire. L’analyse de la relation Sujet-Instrument-Objet, motivée par les intentions des acteurs, et du déploiement de la division du travail et des règles qui se créent dans la communauté, nous permet d’analyser les contraintes que génère la nouvelle activité de transformation. Dans le cas de notre étude, l’intériorisation et l’extériorisation des instruments conceptuels (communauté d’apprentissage, stratégies pédagogiques socioconstructivistes et culture de réseau) et techniques (TIC, retours réflexifs, plans de travail et organisation physique de la classe) ont offert aux acteurs la possibilité d’adopter des stratégies pédagogiques socioconstructivistes, par l’entremise du travail en équipe d’enseignants, pour favoriser le développement d’une communauté d’apprentissage en réseau, de démocratiser et de faire apparaître de nouveaux rôles ainsi que de transformer collectivement des règles. Nous constatons que la généralisation de ces actions et de ces opérations a contribué positivement à la mise sur pied d’une communauté d’apprentissage en réseau tout en faisant émerger des pratiques favorables à la coélaboration de connaissances.»

D'abord, parlons des conditions:
(Les gras dans les citations sont de moi):

L'expérience menée en 2003-2004 qui a fait l'objet de cette étude a eu lieu dans une école privée. Je n'ai pas fait de recherches sur sa clientèle, mais bon déjà les 43 élèves de 5e et 6e année pour l'étude se sont fait acheter par leurs parents chacun un portable. Ensuite, «La répartition des élèves entre la 5e et la 6e année a été réalisée selon le nombre d'inscriptions par année. Toutefois, même si aucun test de capacités intellectuelles n’a été administré, une sélection a été faite en fonction des capacités des élèves à travailler en coopération et en collaboration tout en étant autonomes

On a aménagé un local spécial pour accueillir ces 43 élèves. 3,4 profs (100%, 100%, 80%, 60%) en terme de pourcentage de tâche ont été assignés à cette expérience, qui se sont partagés des spécialisations (français écrit, français lecture, math, math et sciences). On parle donc d'un ratio d'environ 12, 35 élèves par prof. Avec un bassin de seulement 43 élèves, je le répète. Un prof d'éducation physique et un autre prof qui prenaient les élèves au moins une demi-journée, je crois, par 6 jours, permettaient aux 4 profs réguliers de tenir des réunions d'équipe.

Jusqu'ici, je note que certaines conditions sont ici très favorables à la conduite de ce genre d'activités socioconstructives. Il  me semble que jamais le Mels n'a parlé de mettre en place ce genre de conditions pour aider la mise en oeuvre de sa réforme. C'est d'ailleurs un détail, et des moins accessoires, qu'on a vu d'aucuns balayer du revers de la main comme une mouche fatigante à plus d'une reprise dans nos admirables formations. Bon, je ne parle pas de l'implication du directeur qui est non comptabilisée, ni de la personne chargée de la recherche qui est venue 3 fois par semaine qui a interagi avec la dynamique pour la comprendre et des personnes-ressources dont on parle sans trop préciser ce qu'elles ont pu y faire.

La nature descriptive de cette étude

Bon, cette étude est de nature ethnographique. «La recherche s'attarde sur l’activité de transformation d’un environnement d’apprentissage au niveau primaire. L’objectif n’est pas de tirer, pour l’ensemble des environnements d’apprentissage au niveau primaire, des lois générales quant à l’activité de transformation observée sur le terrain. Cette étude qualitative vise plutôt à brosser un portrait descriptif de l’activité des acteurs concernés, telle que perçue par les personnes directement impliquées, et ce, selon le cadre conceptuel de la théorie de l’activité d’Engeström (1999) présenté au chapitre 3.» (1.6 Limites de l’étude) On comprend que ce n'est pas l'affaire de cette chercheuse de mesurer ce que les enfants ont effectivement appris dans le processus.

La conclusion est assez explicite:

«Notons que cette communauté d’apprentissage s’est déployée dans un contexte favorable où les instruments techniques étaient largement disponibles. Néanmoins, rappelons que la littérature relate d’autres cas où la mise sur pied de communautés d’apprentissage et de coélaboration de connaissances a été réalisable avec des dispositifs moindres (par exemple, quelques ordinateurs disponibles pour une classe où un seul enseignant est titulaire). Les stratégies pédagogiques innovatrices – tels la différenciation pédagogique, le multitâche, l’intégration des matières (notamment en impliquant les différents intervenants de l’école) et l’établissement de partenariats avec l’extérieur – représentent des vecteurs clés favorisant le développement de communautés où le ratio est plutôt d’un enseignant pour une trentaine d’élèves.»

Bon, j'aimerais voir cette littérature qui relate d'autres cas. Elle me semble vite en affaire la chercheuse. Comme le souligne, plus loin, il serait certainement intéressant de voir sur une étude longitudinale, sur plusieurs années, l'impact d'une telle approche. Je n'ai malheureusement pas entendu parler de telles études.

Problème de solution:

Bref, je comprends que, dans de bonnes conditions, on peut faire des communautés d'apprentissage dans un paradigme socio-constructiviste et que cela crée un fort sentiment d'appartenance à la communauté d'apprentissage. Quelles est l'impact de cette approche sur la qualité des acquisitions ou les résultats scolaires? Pas de réponse. Est-ce qu'une telle approche aurait un effet aussi mobilisateur dans la durée sur de longues années? Pas de réponse.

J'ai du mal à ne pas voir cette recette-solution très conditionnée dans sa réussite par un ensemble assez appréciable de conditions facilitantes. J'ai vraiment du mal à penser qu'à partir d'une telle étude, on puisse penser que des profs de français au secondaire, par exemple, puissent, en 8h présence seul en classe environ par semaine avec 30 élèves et avec 3 groupes dans sa tâche, bien suivre et devenir le facilitateur de 3 communautés d'apprentissage «culturelles» avec 3 équipes de profs idéalement à joindre par groupe, tous pris dans des horaires alambiqués.

On demande à M. Principe de Réalité de se présenter au MELS le plus rapidement possible!

Est-ce que quelqu'un, dans ce nid de penseurs, a assez de jugeote pour voir que cette solution magique ne peut pas s'appliquer à tous, dans tous les contextes, sans un remaniement spectaculaire des conditions de travail et des fonds assez substantiels pour y arriver? A-t-on les moyens de vos utopies? Non, me semble la réponse appropriée. Il faut trouver autre chose pour l'école à 25-30-35 élèves par classe de l'école publique.

Encore là, je le réaffirme: sans l'analyse adéquate et différenciée de la réalité de terrain sur laquelle on veut intervenir, une solution préemballée n'a aucune valeur. Que les hauts lieux nous entendent!

vendredi 5 mars 2010

La solution qui faTIC! Histoires pour se laisser endormir!

Quand on y pense, toute la structure de programme de la réforme de 2000 et du renouveau de 2005 repose sur l'idée que, dans l'avenir, avec l'émergence d'Internet, il n'est plus nécessaire d'apprendre bêtement des connaissances qu'on mémorise parce qu'on peut trouver du bout du doigt  sur Internet toute l'information dont on a besoin. Bref, on doit donc maintenant mettre l'emphase sur la transmission des compétences de haut niveau qui permettent de traiter l'information. Bref, moi j'ai acheté mon premier ordinateur capable de surfer cette année-là et on savait déjà que Internet allait être le truc hot et révolutionnaire de l'avenir. On s'est lancé dans l'évidence qui, chacun sait, est évider, rendre vide, quelque chose en dansant, par exemple un kiwi ou une cervelle de singe! Macabre, je sais. Presque autant que ce système d'exaltés.

Je viens de lire un texte qui démonte, comme dans l'émission Comment ça marche? le «bête solutionnaire»  de la réforme qui s'achète en se laissant endormir par des sophistes parce que le prof moyen, le parent moyen, le penseur moyen ne pense pas vraiment. Il en a juste l'air. Il collectionne les beaux raisonnements et les reproduit, les disserte avec un air savant dans des conversations de salon ou devant une classe, les twitte, les diffuse sans prendre la peine de faire son petit examen de la solution. Sans franchement en plus se douter qu'il ne comprend rien à rien du sous-jacent . Personne ne connaissait ça, par exemple, des compétences transversales et je me demande si on le sait même un petit peu plus aujourd'hui même s'il est banal de «ploguer»  maintenant pour faire «in» l'expression. En tout cas, on ne les évaluera plus, paraitrait-il, faute de bien les saisir, si je ne m'abuse, est-on en train de méditer dans les hauts lieux de l'éducation! Ça aura pris 10 ans pour se réveiller, mais bon, qu'est-ce que 10 ans dans l'histoire du monde après tout! Moi, j'ai juste pas compris la première fois et ai senti que le gars qui avait rédigé le truc s'emmêlait lui-même dans sa corde. Je suis devenu sceptique de la réforme à cet instant. Mais bon, j'ai pas de mérite, chez nous, c'est un réflexe. J'ai beaucoup de doute que l'esprit critique se montre à l'école, ça prend un peu plus de percussion au départ pour sonner la naïveté satisfaite. On a pu trop de marge, si vous me comprenez! Et pis bon, faut laisser le jeune à son processus d'apprentissage. Bref, les jases d'Oies au secondaire inondent les tympans...

Juste pour montrer l'aberration conceptuelle de la chose, ma copine fait des cours ÉDU (quelle horreur!) d'université avec la Teluq. La définition de compétence, c'est un tableau sur 2 pages. Elle est évidemment sonné presque « sans connaissance»! Je lui ai dit: «Welcome in the wonderful world of the wizard of Oz». Et la parabole tibétaine, où un moine remplit une tasse de thé devant son apprenti trop plein de certitudes (et non, ce n'était pas des connaissances nécessairement, bande de twitter-speedzen) et la laisse déborder pour lui faire la leçon ne l'a pas aidée! Comme dirait un autre que j'ai lu ce matin à la chute rigolote, faudra ramasser le dégât pareil!

Bref, j'aurais pu écrire ce texte, je connaissais ces études en psycho-cognitive et sur la lecture, mais bon Normand Baillargeon y a pensé avant moi! Dans sa compilation de textes Contre la réforme, on retrouve ce texte publié dans la revue A bâbord et ça s'intitule :

Internet comme mirage pédagogique

Oui, oui, d'un clic, on peut le lire aussi. C'est pas long, je le sais, vous avez probablement autre chose à faire mes Twister sisters! Mais bon, j'aurais souhaité que vous le méditiez un tantinet.  Pro-réformateurs s'abstenir!