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mercredi 7 avril 2010

Cours d'autorité pour enseignants en France

On dirait que les enseignants européens en reviennent de l'approche éducative de l'autorité comme celle sur laquelle je suis tombé (un peu rose bonbon) en faisant cette recherche de vidéo d'un reportage que j'ai vu hier sur France 2 à TV5.

Ici, je ne sais trop où l'on en est avec la discipline, j'ai comme l'impression qu'on fait le plus souvent comme s'il n'y avait pas de problèmes... Et pourtant!

Une enseignante du reportage disait qu'il n'y a pas si longtemps on ne pouvait pas parler de difficultés de gestion de classe, car évidemment la gestion, on l'a ou on ne l'a pas, se faisait-on répondre. Il semble que devant l'incapacité d'aider, on peut ainsi nier le problème en lui enlevant toute légitimité. J'ai vu cette attitude-là par ici aussi et celle défaitiste du genre: «tsé quand les parents laissent tout faire à la maison... » Comme si c'était né hier ce genre de style parental!

La vérité est bien sûr dans le fait que la gestion de classe et l'exercice de l'autorité s'apprend et peut se transmettre puisqu'on prépare des cours et de la supervision pour ce genre de difficultés. Enfin, quand l'école offre une structure d'encadrement et du support, notre métier devient nettement plus intéressant au secondaire en tout cas.

Des trucs, on s'en développe sur le tas aussi! Par exemple, je n'entrais plus dans une classe inconnue ou encore partiellement connue sans un plan de classe ou en faire un (grossier, les prénoms suffisent) in situ pendant la prise des présences. Évidemment, avec un groupe d'élèves doués souvent plus naturellement disciplinés, on peut  s'en passer. Au régulier, c'est comme une télécommande pour le reste de la période. Rien de mieux que d'apostropher Ti-jo par son vrai prénom pour le ramener à la raison... Évidemment, ça peut prendre une coupe d'autres ingrédients... Mais bon, ça calme un peu le climat de Party qu'on veut partir avec le suppléant. Bon, tu apprends ça à la dure, quand sans plan de classe tu essaies de hurler à Chose Bine de se la fermer et qu'il fait comme si t'avais rien dit ou que tu n'existes pas, bien sûr pour épater la galerie! Je veux bien voir le comportement déviant comme l'expression d'un besoin, mais bon le besoin de faire le «smat» peut aussi ne pas se faire à mes dépens! Bref, le plan pendant la prise des présences est une habitude que je suggère au suppléant débarquant sur la nouvelle planète!

Enfin, on peut très bien fonctionner dans différents contextes avec peu de moyens et apprendre sur la tas ou de collègues attentifs et généreux les trucs du métier, n'empêche qu'on peut se retrouver un jour dépassé par des dynamiques de groupes et avoir donc besoin d'un peu d'aide. Pourquoi n'avons-nous pas de conseillers en gestion de classe compétents dans nos écoles? Pas un patron, ce qui peut créer des conflits d'intérêts, non une aide professionnelle... (des profs à la retraite partis trop vite sans avoir le temps de transmettre les trucs du métier par exemple).

Quand on pense que nous avons souvent sous notre responsabilité 30 jeunes, je trouve assez téméraire de se lancer dans des aventures sans une certaine autorité établie qui ne peut exister sans une certaine relation et un cadre de relations bien mené, bien compris par les jeunes. Malheureusement, souvent il faut se planter quelques fois avant de se résoudre à une méthode préventive et active!

5 commentaires:

armand a dit…

Cher Prof,
Je t'ai déjà dit que j'aimais lire les carnets d'enseignants car j'y trouvais moins de fautes qu'ailleurs, en général (car il est de tristes exceptions).
Généralement, la réponse aux problèmes d'élèves indisciplinés que tu évoques mène à des demandes de "moyens" supplémentaires.
Comme tu l'évoques, ce n'est pas toujours une réponse: certains ne sont pas "faits" pour ton métier.
Un manque d'autorité ne se résout pas par une grève!
Amitiés

Hélène a dit…

Coïncidence ou non , la réflexion de Josée Blanchette va dans le même sens et m'a fait bien sourire ce matin. (Le Devoir, vendredi 9 avril). Combien de jeunes sont élevés sans autorité parentale ? Je suis inscrite au programme d'enseignement de l'anglais (Beals) et, en tant qu'étudiante plus âgée effectuant un retour aux études et le choix d'une deuxième carrière, je constate, voire même, je subis l'indiscipline et le non-respect de certains jeunes qui parlent et babillent sans arrêt dans nos cours de 1re année universitaire ( sans parler du temps passé sur FaceBook pendant la classe). Tel que vous le mentionnez, certains enseignants ont peine à réagir, et l'on dirait qu'ils font semblant que le problème n'existe pas. Pourtant c'est pénible pour les étudiants qui paient et qui sont en droit d'avoir une classe normale. Encore hier soir, quelques étudiant(es) m'exprimaient leur désarroi et incompréhension devant certains jeunes universitaires qui n'ont aucun respect pour leur enseignant(e). Est-ce que les enseignants d'université auront aussi besoin de faire des cours d'autorité ?
Josée Blanchette mentionnent des enfants qui traitent leur mère de "grosse conne" , et bien sachez qu'il m'est arrivé d'entendre cela aussi d'étudiants à l'égard de leur enseignant. À mon sens c'est impensable et inaceptable. Pourtant, ces jeunes universitaires seront éventuellement eux-même des enseignants..

Jonathan Livingston a dit…

Bonjour Hélène,

Oui, la discipline et le respect de certaines règles de fonctionnement nécessaires dans toute activité de groupe d'éducation, pour la simple et bonne raison que pour apprendre il faut avoir une certaine concentration, font défaut à tout niveau dans le milieu scolaire. Cette situation est à déplorer.

Puisque les temps sont à la socio-construction, peut-être que si des adultes soulevaient le débat dans le cours pour parler du problème et voir avec votre «accompagnateur» (professeur) si on ne pourrait pas trouver des moyens pour régler le problème serait probablement l'approche à privilégier. Enfin, ce serait intéressant de voir si on peut discuter démocratiquement et obtenir certains résultats chez des adultes. Il suffit de trouver une grande gueule parmi les irrités par la situation et de le soutenir lors de l'intervention. Prévenir le prof de votre volonté de débattre de la situation serait sûrement aussi plus favorable pour ne pas se le mettre à dos!

A l'université, entre adultes, peut-être qu'on arriverait avec une certaine implication à faire valoir vos besoins légitimes d'un certain ordre dans les cours. Mais bon, imaginez combien de jeunes endurent le chaos des autres dans un monde où l'on croit que le dialogue et la raison comprise de tous réussit à créer une atmosphère propice aux apprentissages dans un esprit de collaboration.

Concernant, l'autorité, je crois, malheureusement, que sous l'empire de cette réforme qui veut créer des communautés d'apprentissage démocratiques pour former le citoyen de demain, cette dimension est devenu tabou, voire quasi interdite avec une espèce de glissement de l'autorité de fonction à celui d'autorité en terme d'expertise qui par magie ferait apparaître le respect. Il est temps qu'on se revienne tous à la raison et qu'on comprenne que l'école a besoin d'une autorité qui permet à la classe de fonctionner et qu'un adulte en autorité doit veiller à gérer les écarts de conduite du groupe qu'il a sous sa gouverne. Avec des enfants, en plus, il est un adulte responsable de la sécurité aussi. Bref, on doit se résoudre à reparler ouvertement de mesures de sanction face à la déviance et des leviers de l'autorité fonctionnelle.

Le style démocratique fait perdre une temps non nécessaire en classe à tout le monde. Il faut ensuite comme responsable de l'autorité de fait, développer des prodiges de manipulations des autres pour arriver à faire triompher le bon sens, ce qui est stupide.

Je ne me suis pas lancé en enseignement pour devenir un vendeur. Évidemment, comme enseignant on influence, on joue sur tous les leviers d 'influence qu'on a, mais bon, faut pas nous prendre pour des dieux qui savent toujours obtenir des autres la bonne conduite à développer.

Je vous trouve courageuse de reprendre des études. Bonne continuation.

Jonathan Livingston a dit…

Bonjour Armand,

Peut-être que des gens ne sont pas faits pour notre métier de dingues (ou de masochistes) en ce moment, mais non je n'évoquais pas cette question.

J'évoquais des formations qui remettent la personnalité du prof de l'avant pour qu'il incarne l'autorité. Si je comprends bien, on y enseigne une posture d'autorité qui, depuis l'arrivée de la vision de l'école mini-démocratie, a été sous-estimé, sous-enseigné, dévalorisé, voire réprimé. Or, dans une groupe de jeunes immatures, pour fonctionner, on a besoin d'une autorité ferme qui pose une système de règles claires et les fait respecter sans hésitations, avec des sanctions claires en cas de déviance pour montrer le sérieux des règles.

Avec ce climat, où l'on nous supporte mal dans cette dimension de l'enseignement aux jeunes, je crois que oui, des moyens complémentaires sont parfois nécessaires (comme des surveillants pour surveiller des jeunes qui doivent être retirés de la classe) et oui, peut-être, face à une système qui nie et persiste à nier le problème, une grève peut entrer dans les moyens raisonnables de remettre l'autorité des enseignants à l'ordre du jour de l'école. Évidemment, chaque enseignant a son travail à faire. Je crois que, pour la plupart, l'intégration de certains principes et de certaines techniques, permet à un adulte qui enseigne de s'équiper correctement pour la tâche. Trop souvent,le milieu ne l'aide pas dans cette acquisition pour le juger inapte avant même de l'aider à corriger certaines difficultés. C'est ridicule et la société perd des éléments qui pourraient faire de très bons profs.

L'autorité en enseignement est une nécessité fonctionnelle dans les grands groupes surtout. C'est l'affaire de toute l'école, et même de la société de comprendre et de supporter cette nécessité de fonctionnement. Ou l'école perd son sens... et devient jardin d'enfants.

Jonathan Livingston a dit…

Hélène, je viens de lire le texte de Josée Blanchette! Un délice!

(http://www.ledevoir.com/societe/actualites-en-societe/286579/vive-la-consanguinite)

Moi, aussi, je regarde des fois Les Parent et je me dis que je serais dans un asile depuis longtemps si j'avais tenté ce style parental!

Mais bon, aussi, de nos jours, le climat d'influence qui incite à devenir des parents cool peut mettre à rude épreuve un couple qui n'est pas sur la même longueur d'onde aussi... Enfin, clairement, si j'avais su, j'aurais opté pour la vasectomie à 20 ans!

Imaginez les classes au Québec sont pleines de ces jeunes qui ne font pas trop la différence entre la maison et la classe... Pourtant, comme le souligne Josée Blanchette, il y a moyen d'avoir des enfants sortables...