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samedi 8 octobre 2011

Parlons grammaire! Pour en finir avec le «pépin» du groupe du nom donneur d'accord! (retouché ici et là)

Bon, on ne naît pas prof de français, on le devient parfois même au hasard d'une vie et on se réveille surpris en pensant à ses rêves d'enfance. Enfin, je m'éclate dans ce métier et même quand j'essaie de faire comprendre des trucs compliqués de la langue.


J'aime bien la nouvelle interface de Blogger et cette possibilité de voir combien de gens s'intéressent à certains de nos écrits. Bon, je ne tape pas des «scores» mirobolants, mais ça donne une idée. J'ai été étonné de voir 125 clics sur mon texte de décembre dernier qui commentait les résultats aux examens du Mels en français car,en le relisant, j'ai constaté que c'était plutôt un texte ardu qui entrait dans les détails d'une réflexion qui m'alimente depuis des années.


J'ai relu et je suis tombé sur une phrase nébuleuse  qui portait sur le fait de poser des questions pour trouver les mots aux fonctions importantes comme un sujet notamment. Ma phrase était vraiment moche, et le point, des plus importants, il me semble.


Bref, je reprends un passage et développe. Voici ce que ça donne.

A propos de l'accord sujet-verbe, étude comparée ou pourquoi faire simple...

Même si l'intention de la nouvelle grammaire semblait bonne, je suis obligé de penser après usage que l'ancienne approche était supérieure sans être parfaite. Je suis complètement en désaccord avec les tenants de la nouvelle grammaire qui soutenaient que la vieille grammaire péchait en se servant de divers niveaux de sens (sémantique, syntaxique, etc.) pour faire appréhender le fonctionnement du système de la langue. Le grand péché, pour les «syntaxicologues» de la nouvelle grammaire, était en effet d'utiliser le sens pour faire comprendre le fonctionnement de la grammaire. Selon eux, il faudrait dorénavant tout présenter les données de la grammaire par l'entrée syntaxique, ordonnée dans une système logique. Et le moyen tout trouvé serait la manipulation syntaxique.C'était plus logique!

Seul petit problème, que tout le monde un peu pressé de réussir dans notre époque très moderne avait éludé, c'est qu'un enfant n'a pas encore l'appareil intellectuel pour appréhender un ensemble logiquement organisé d'une telle complexité. Rapidement, la terminologie les gave, les exposés qui tendent à être exhaustifs les saturent, les manipulations sont longues et fastidieuses à déployer pour l'époque de l'instant tanné! Récemment les TiC peuvent nous aider à gagner en efficacité manipulatrice de groupe syntaxique dans les exposés, on peut même amener les jeunes à jouer avec leurs syntagmes sur un tableau interactif, mais les fameuses machines ne changent rien au fait que le cerveau de l'enfant ou de l'ado est peu souple pour opérer en action des manipulations mentalement pour bien analyser ses phrases et les corriger in situ. Enfin, de nombreux adultes formés dans les universités pour enseigner n'y parvenaient même pas, même à coup de formations massues!

Ainsi, occire au bucher les «questions», moyen économique d'analyse et de repérage classique, avant et après le verbe pour opérer des classements de fonctions étaient une belle erreur pratique à mon sens. On aurait pu valoriser l'entrée syntaxique et la logique positionnelle des groupes et leur fonction  et même la manipulation syntaxique sans tout jeter par terre. Oui, mais effectivement la vieille grammaire n'était pas parfaite, elle recélait bien des incongruités. On a tous vu les exemples mignons de ces tenants du genre: Rien n'a d'importance. Qu'est qui  n'a pas d'importance? Rien. Donc il n'y a pas de sujet!

Mais franchement, ne remarque-t-on pas que ces exemples de cirque sont des situations assez rares dans la langue. Non, on est crédules devant la détermination d'un système orchestré de haut et on ne réfléchit pas pour la simple raison que la solution de rechange miracle proposée est d'une belle complexité, pour le moment obscure. Mais, après des années dans cette «mouise», on peut en dire un peu plus.



Commençons donc par être bon joueur et soyons honnête: valoriser le positionnement syntaxique à gauche ou devant le verbe comme la nouvelle grammaire le fait est une entrée aussi intéressante. Cette révolution m'a donné au moins cela: dans une phrase, la plupart du temps, on a d'abord le sujet puis le verbe et ses compléments, dans cet ordre. Mais ne m'abuse-je?  Le sujet-verbe-complément d’antan ne faisait-il office de structure positionnelle déjà, non?

Tiens, avec le recul en imitant les tenants d'alors de la logique de la nouvelle grammaire, je pourrais jouer le guignol critique pour épater la galerie avec des exemples mignons du genre: Dans la forêt dormaient les bêtes! «Monsieur, vous avez fait une faute: forêt est singulier et votre verbe est au pluriel et on peut dire C'est dans la forêt que dormaient les bêtes! Donc, dans la forêt est le sujet. » («Ma foi, ce «bollé» m'énerve, là! » se disait le prof tout déstabilisé.) Et je ne parle pas des sujets complexes avec complément du nom, apposition, etc. qui continuent d'exister et de mettre au défi nos jeunes et nos ressources de pédagogue. Évidemment, si on applique toute la poutine des manipulations parce qu'on a un cerveau 2G ou bien des années d'expérience de l'enseignement, on trouvera bien le moyen de faire admettre que ce sont bien les satanées bêtes qui dorment dans la foutue forêt! Mais bon, je ne crois pas que la méthode exhaustive préviennent les méprises d'analyse. Surtout que, si vous êtes comme moi, l'opération des accords est un processus mental un peu mécanique qui consiste à accorder assez systématiquement les groupes en avant du verbe et d'avoir un œil sur les constructions inhabituelles et, en cas de doute, un petit qui? devant le verbe et on se rassure. Je n'ai jamais compris l'utilité de la quincaillerie des manipulations quand on me l'a proposée il y a 15 ans, parce que j'avais plus simple pour faire la même chose.

A la recherche du noyau ou Pépin Le Bref, l'introuvable!

Mais sérieusement, dans une telle situation de GN un peu plus complexe que de coutume, notre jeune imberbe le trouve où  et comment le noyau du GN sujet donneur d'accord au fait dans cette nouvelle grammaire «syntaxique» ? Théoriquement, en reconnaissant, la phrase de base (GNS-GV), puis surement les expansions qui caractérisent le GN (qui peuvent être comme me l'indique la section du GN dans la section «Les connaissances» de RENDEZ-VOUS, méthode didactique en vogue dans nos écoles pour le sec.1: G adj; G prep., Sub. relative, un autre GN, expansions qui remplissent la fonction de complément du nom faut-il le préciser). Franchement, pour un jeune de 11-12 ans, cette page 369 est du chinois.

Et les pages 424-425, où on fournit plusieurs façons de se «démêler» dans la recherche de ce noyau donneur d'accord, n'y arrivent pas davantage. Distinguer sujet-prédicat par le sens en passant et en posant  les questions: de quoi parle-t-on dans cette phrase? et qu'est-ce qu'on en dit? pour les distinguer. Serait-ce du sens, très cher «syntaxicologue»? Ouwach! En passant, quand j'enseigne cela, au début, le jeune trouve qu'on peut parler de tout dans une phrase: il te ramasse le premier GN qui impacte ses yeux et le promeut sujet); le sujet est ce qui se remplace par la question qui est-ce qui? ou qu'est-ce qui? (Manipulation certes fort intéressante! Serait-ce une manipulation déguisée de vieux procédés? Dans la forêt, dormaient qui est-ce qui? Je ne trouve pas ce test très probant...); un sujet s'encadre par C'est... que (Tiens une nouveauté franchement, évidente et pratique! Je l'ai déjà invalidée. C'est... que quoi?;-)) et on peut remplacer le sujet par un des pronoms suivants: il, ils, elle, elles, cela, ça (Tiens en toute fin de tout cela, un peu de sens, mais bon dans : Je trouve ce bruit fatigant, c'est bien «ce bruit» que je risque de prendre pour un sujet).

J'ai aussi cherché un peu dans la section Donneur d'accord  par l'Index si on avait des éclairages pour se démêler, je n'ai pas trouvé bien mieux p.306 que «Le sujet donne sa personne et son nombre au verbe ou à l'auxiliaire (si le verbe est à un temps composé)». On ne parle même pas du noyau et les exemples n'expliquent pas franchement grand chose ni ne donnent de moyens pratiques pour trouver le sujet-noyau (admirez l'exhaustivité de l'énoncé avec la belle parenthèse en passant! Le pire, c'est qu'on n'a même pas conscience d'embrouiller nos jeunes par de telles précisions inutiles).

D'ailleurs, n'avez-vous pas remarqué que cette grammaire nouvelle souffre souvent de défauts d'explication ou de procédés pratiques pour opérer certaines actions pourtant vitales au respect du code linguistique? Combien de nouvelles grammaires éludent les explications dans des exemples qu'on nous laisse le soin de comprendre sans plus expliquer. Ouvrez au hasard n'importe quelles grammaires nouvelles sur le marché et visiter la rubrique Complément direct. C'est QUELQUE CHOSE!

Enfin, pour revenir au rendez-vous manqué dans la méthode avec notre très cher noyau, «humoristiquement» surnommé Pépin le Bref, l'introuvable, j'espère que nos profs ne prennent pas trop au pied de la lettre leur rôle d'accompagnateur dans la co-construction, parce que la p.490 du dit manuel scolaire approuvé par le MELS n'est pas plus éclairante: on y présente une démarche d'accord du verbe qui demande bien: Repérez le noyau du GN sujet ou le pronom sujet . Ce sont des donneurs. On ne précise pas, lacune évidente, comment on s'y prend sinon que par des exemples dans des phrases pas trop complexes.

Pour moi,  et beaucoup de confrères et de consœurs qui me l'ont avoué, et des générations de vie humaines, c'est bien simple, trouver le sujet précis ou le mot utile ou noyau, le pépin, pour l'accord du verbe se résume à poser la question qui? devant le verbe. Juste ça.

Essayez, ça marche 99% des fois, même en situation assez complexe, même avec un enfant. Qui dormaient? Les bêtes! Au gaz! Même avec le « rien» plutôt nulle de l'exemple, ou on a juste à répondre que le «rien» est un sujet fabuleux! Surtout s'il est accroché à un prédicat qui dit que «tout» en fait n'a pas d'importance, ce qui est fichtrement discutable! Notre jeune découvre l'esprit, ne nous embrouillons pas pour si peu. Rions un peu, expliquons-lui que la grammaire est un monde un peu étrange parfois sans en faire un plat et poursuivons les exercices pour continuer de  faire réussir à l'enfant ses accords sujet-verbe en posant des questions qui ? devant le verbe. Les enseignants se laisseraient-ils si facilement perturber par les Petit Nicolas.

Et remarquez que je ne m'embarrasse pas de détails: Qui est-ce qui ou Qu'est-ce qui? non juste Qui?. Ex. L'amour rend heureux. Qui rend heureux? L'amour. Ben oui, ça tord un peu. Mais ça reste encore tout à fait sensé. Puis, si notre jeune dit: «Ben, y a personne dans la phrase?». Là je précise ou je dis on dirait que dans cette phrase fait comme si l'amour était une personne ou ben simplement on sort le Qu'est-ce qui? du panier, question presque pareil au qui? pour mieux convenir aux sujets de phrase qui sont des objets ou des idées.  Mais s'il zappe et obtient le résultat escompté, on peut continuer de dormir: un jour, notre jeune fera des nuances. Il entrera dans les détails plus tard. Pour le moment, il a un outil utile, des dents pour traquer du Pépin, donneur d'accord, à son foutu receveur de verbe!

Avec de l'entrainement, on ne remarque même plus qu'on le fait, tellement c'est simple.

Certains diront et là, je concède, que bien des jeunes ont du mal à trouver le verbe pour commencer avant même de poser la question. On peut à ce stade évidemment parler de la structure syntaxique, de groupe et de machin et j'en passe ou simplement dire au jeune: Qui fait quoi dans la phrase? Ou Qui est quoi? et lui faire comprendre que le «fait» dans cette question est l'action, le verbe. Par le sens du mot faire, le jeune normalement accède à la réalité du verbe naturellement pour la bonne raison qu'il a intégré qu'il fait lui-même plein de choses qui se désignent par tout un tas de mots.

On peut ensuite toujours, tranquillement, complexifier, une phrase, c'est normalement un GS puis un GV : quelqu'un ou quelque chose (sujet) fait quelque chose (GV) et construire doucement sur cette base une logique de la grammaire, plus syntaxique même, si on y tient. 

Car, bref, comme le disait Pépin, c'est après avoir examiné bien des détails et compris bien des petites choses en se posant des questions simples à partir de ce qu'il connaissait et accédait, que notre fameux Archimède a eu soudainement la vision globale et logique pour s'écrier:«Euréka!». La logique systémique complexe émerge tranquillement dans l'adolescence avec le développement de la capacité d'abstraction avec plein d'incohérences, d'essais et d'erreurs. Il faut même bien des années et beaucoup d'entrainement pour apprendre à bien saisir certaines représentations humaines. Ce n'est pas un donné instantané de l'enfance! Loin de là. Il serait temps qu'on en prenne conscience.


1 commentaire:

Le professeur masqué a dit…

Première secondaire. Programme enrichi. Activité difficile: on cherche à identifier des verbes, des GNs et des GNCD. Et si j'inverse le GNs, c'est la pagaille! Un sujet est toujours placé avant le verbe, voyons! Plus rigolo, dans la phrase «Je le frappe», le sujet est «le».

Et cette idée de parler de groupe sans entrer dans les détails. Ils en font des GNs+GV+CP au primaire, mais ils ne comprennent rien de ce qu'ils font. Alors, imagine quand ils lient des textes et cherchent à comprendre une phrase.

On veut en faire des linguistes. Moi qui croyais qu'ils devaient apprendre à lire et écrire.