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jeudi 22 mars 2012

La pression académique et les conclusions qui arrangent les gens.

Je lisais cet article ce matin qui affirme que « les enfants obtiendraient de meilleurs résultats scolaires en l’absence de cette pression académique qui accompagne souvent les évaluations».

Quand on lit le résumé de l'expérimentation qu'offre cet article, on se demande franchement ce qu'on veut insinuer.
«Le groupe de chercheurs a mené deux expérimentations. La première a sollicité 111 élèves de sixième année qui devaient résoudre des problèmes très difficiles (c'était des anagrammes). Aucun d’entre eux n’a réussi. Un chercheur discutait ensuite de la difficulté de la tâche avec les enfants selon deux perspectives différentes. Un groupe entendait que l’apprentissage était difficile et que l’échec était normal. Les enfants de l’autre groupe ont seulement été questionnés à propos de leur méthode de résolution de problème. Tous les participants devaient ensuite passer un test mesurant leur mémoire. Les étudiants du premier groupe ont obtenu de meilleurs résultats que les autres

Je trouve curieux le protocole et me demande en quoi il nous apporte un éclairage sur nos pratiques. Car, si l'on passe des problèmes difficiles à des jeunes et qu'on peut affirmer qu'aucun n'a réussi, on ne va généralement pas repasser un test pour voir dans quel état se trouve leur mémoire de travail .

Quand on lit l'article plus en détail dans sa version anglaise, on trouve finalement que si  on rassure les jeunes après une mauvaise performance, les jeunes démontrent une meilleure disposition à retenir. Si on les questionne sur leur manière de travailler, bref on les met en stress d'expliquer pourquoi ils n'ont pas réussi, on les perturbe.

Bref, rien de nouveau sous le soleil: l'émotion perturbe la mémoire de travail. Pour moi, c'est tout ce que cette jolie expérience démontre. Et c'est connu depuis longtemps. Mais on arrive à dire des imbécilités avec cela comme: Teachers and parents should emphasize children’s progress rather than focusing solely on grades and test scores.

Il est toujours intéressant de voir que des gens font des recherches et laissent entendre des choses implicites: comme les profs et les parents se concentrent seulement sur les résultats aux tests. Nous, les profs, on ne pense pas à parler du processus, à avertir nos jeunes que c'est difficile ou facile, ou faisable quand ils sont devant de nouveaux problèmes.


C'est évidemment ce genre d'études qui finit par faire dire à des gens qui écrivent des programmes qu'il ne faut pas mettre trop d'importance aux évaluations, que ça stresse les élèves.


Par expérience, à moins d'avoir des élèves absolument conquis à l'apprentissage de type scolaire, qui ne discutent pas pour faire un effort de travail, généralement on n'a pas trop le choix pour les tirer en avant de dire simplement que ça compte.

Car, il y a pire que la pression académique, il y a l'absence de pression.


Et pire encore, l'évaluation bidon ou bonbon: on n'évalue pas vraiment les enfants et ils passent tous.


Personnellement, je met l'emphase sur le travail qui mène à la réussite. Et bien sûr, en travaillant, on entre dans le processus pour aboutir un moment donné à une note. S'il n'existe pas une réalité qui sanctionne dans le parcours de l'élève qui apprend en groupe, généralement, enfin beaucoup d'entre eux vont détourner leur attention vers autre chose que l'apprentissage, le plus souvent travailler à vérifier leur niveau de popularité au sein du groupe ou se laisser divertir par celui qui travaille à cette tâche!


mercredi 21 mars 2012

ÉQUINOXE

C'est quoi ça? J'ai des jeunes de 15-16 ans qui ne savent pas, il sont rendus en secondaire 3. Ils sont fabuleusement ignorants pour des jeunes qui viennent de faire de l'histoire et de la géo dans les dernières années. Ce n'est plus au programme: les planètes, les orbites, les solstices, les équinoxes... Non, ils développent leur apprendre à apprendre. Toujours. C'est toujours au menu.
  
On cherche encore où s'est perdu le bon sens, où a-t-on oublié de servir ce qui allumait un jeune de 1ère secondaire en cours de géo, il y a 30 ans? Non, ils font des recherches sur une ou deux villes du monde qu'ils savent à peine situer sur une carte du monde. Je caricature, mais on n'est pas loin de là. On patauge dans des univers conceptuels en univers social. On a oublié l'importance de la carte, de la représentation comme point de départ à l'organisation du savoir.


C'est plutôt pathétique.


Fait que j'explique des fois aux jeunes que l'univers est assez grand, trop même pour croire aux petits bonhommes verts. Ils sont tout étonnés et fort intéressés. Je m'aventure dans ce matériel mal fait pour le français juste pour leur parler de l'immensité. Le livre, lui, veut leur parler de métaphore par la biais des galaxies en forme de cigare qui sont des satellites, des petits compagnons de la Voie Lactée.

Y  a un superbe exercice qui consiste à faire une comparaison entre des planètes, parce que évidemment comparer des textes est devenu le grand fin du fin en compréhension de texte au secondaire. Ils ne comprennent pas trop les référents des textes isolément, mais la comparaison entre les textes est là pour sauver la présentation et respecter le programme.


Faut juste que je leur fasse un cours d'astronomie pour faire ma leçon de français... Et puis après la leçon d'astronomie, ils ont rarement du jus pour les métaphores...


Bref, la nuit égale le jour.

samedi 17 mars 2012

Qu'est-ce qui est juste?

Semaine de retour en classe. Lundi: retour sur les examens.C'est souvent une corvée. Ce n'est pas un moment évident. Il faut transmettre des bonnes et mauvaises nouvelles. Il y avait pas mal de mauvaises nouvelles encore. Il faut dire les choses. Et tout le monde est là. Un chance il y a quelques absents. On aimerait quasiment des fois se dédoubler, avoir un isoloir pour prendre le temps de rencontrer le jeune. Mais ça se fait vite au milieu du brouhaha.

Un jeune m'a sorti que je n'encourageais pas les jeunes. J'ai répondu que je n'encourageais pas l'absentéisme, la consommation et le travail non fait. Quand y a du travail, il arrive qu'un prof encourage celui qui fait les efforts.

Plusieurs voient que leur année commence à être fichue. Je leur dis qu'il leur reste 3 mois pour prouver qu'il mérite de passer au niveau suivant. La dernière étape vaut 60 %.


Chez les plus vieux, ça fera un certain ménage. Ceux qui ne font rien depuis le début de l'année en espérant qu'on soit un super prof bonbon qui sauve les jeunes du méchant système se rendent compte après deux évaluations de logique implacable que ça ne va pas changer. Il ne m'avait pas pris au sérieux à la fin de la 1ère étape. Là, ils commencent à comprendre que je ne blague pas avec mes exigences.

Ça parait «dure» comme approche, mais ici, ce  me semble nécessaire de prendre cette position difficile. Mais je ne suis pas seul. Parce qu'évidemment, on redoute parfois dans l'équipe que des parents débarquent pour avoir notre peau. C'est possible. On fait nos paris en ce moment. Les bulletins seront remis la semaine prochaine.

Mais, depuis les fêtes, ils se passent aussi une chose que j'avais anticipée. Si on redonne du sérieux à cette école, plusieurs jeunes de la communauté que des parents ont envoyés ailleurs pour s'assurer un meilleur niveau d'éducation vont revenir. Et depuis janvier, ça a commencé. 3 élèves et là, pour cette étape, un nouveau et on entend des rumeurs de d'autres qui vont revenir en septembre.

L'air de rien, dans un de mes groupes, on commence à voir germer un noyau de jeunes qui travaillent alors que, depuis le début de l'année, il y en avait 2 qui avaient une certaine allure tandis que les autres ne faisaient pas grand chose.

L'approche Mère Thésésa des dernières années a pourri beaucoup d'élèves ici. On ne pourra pas sauver tout le monde. On se pose beaucoup de questions. Que va-t-on proposer pour répondre au besoin  de ces jeunes pas de niveau qui ne fonctionnent pas vraiment  dans des cours réguliers? Et à ces autres qui sont ralentis par l'inertie  en ce moment de cette masse de jeunes dans nos classes qui ne répondent pas à l'enseignement par manque de capacité ou par leur attitude butée. On y réfléchit. On pense à  un groupe multiniveau avec des privilèges, à l'alternative en classe individualisé pour les mener à un métier. Ou un premier cycle sur trois ans. Faire évaluer par l'ortho tout jeune qui passe au secondaire pour bien  le classer.

La limite est toujours qu'on est peu nombreux pour assurer tous ces services. Il y a aussi franchement, la réalité que trop de jeunes sont en difficulté réelle mais non reconnue. Il y a des enveloppes d'argents que l'école ne reçoit pas parce qu'on n'a pas pris le temps dans les années passées par incompétence très probablement d'évaluer correctement des jeunes et de monter des plans d'intervention. Bref, de faire état clairement de la situation. Non, on cachait sous le tapis les problèmes.

En ECR, j'ai décidé d'aborder en ce début d'étape le thème éthique de la justice. Les jeunes embarquent assez après deux périodes dans la discussion: qu'est-ce qui est juste? On examine la répartition des ressources,  la négociation, les différentes conceptions de la justice. Je me suis lancé sans vraiment voir que cela allait nous mener à parler de presque tout. Parler de justice, c'est parler du grand problème de l'évaluation des droits et du mérite dans toutes les sphères de l'activité humaine.

J'ai été interpellé quand j'ai ouvert mon dictionnaire comme point de départ:

JUSTICE:  I- PRINCIPE MORAL QUI FONDE LE DROIT DE CHACUN
1- Juste appréciation, reconnaissance et respect des  droits et  des mérites de chacun. Voir droiture, équité, impartialité, intégrité, probité.

Voilà une suite de mots qui a quelque peu perdu de son verni dans un monde où la manipulation, l'influence et le favoritisme sont en progression, dans un monde où le petit moi en besoin insatiable oublie que nous vivons dans une collectivité et que certaines discussions ou certains mécanismes même imparfaits sont nécessaires pour trancher dans  cette discussion permanente du partage de la réalité.









lundi 12 mars 2012

Des logiques solutions comme celle de l'ordre professionnel

 J'y allais d'un commentaire qui s'est allongé, alors je le mets ici. Ceux qui suivent les débats chez PM et qui sont nombreux à cliquer en partance de chez lui pour venir me donner une petite visite verront que je réagis à certains «point-form» et une certaine conception que l'ordre professionnel est le remède pour les maux en éducation.

Le public ne semble pas protégé par les mesures actuelles du système. Bref, les parents, les jeunes sont-ils maltraités? Mal éduqués? Enfin, PM répond bien à ce genre de propos en rappelant des avis éclairés que certains organismes pertinents ont fait.

L'évaluation continue qu'on veut faire faire au CAQ par un ordre professionnel servirait à finalement promouvoir la formation continue. Ça sous-entend qu'on a besoin de formation pour bien faire notre travail. Or, il y a de vieilles institutions qui diplôment malheureusement n'importe qui et qui peinent à vraiment outiller les gens pour faire ce métier. Ils leur donnent une formation de 3-4 ans pour permettre, on le souhaite, d'apprendre ensuite leur art en le vivant, en le travaillant.

Car, à la confrérie des formateurs en tout genre, je vous fais la confidence que le métier s'apprend beaucoup sur le terrain. Ce métier, que peu ferait à cause de l'enfance actuelle assez particulière, se développe en affutant sa personnalité, en la modulant, en l'assouplissant, en l'adaptant à la double exigence d'être un leader ferme (qui sait où il va, qui ne va pas se  faire mener en bateau par le petit jeune qui teste constamment sa vigueur) et celle d'être un observateur, à l'écoute de l'autre pour animer les explications d'un sens qui fait son chemin chez l'apprenant. Au quotidien, souvent surchargé de travail, que milles urgences détournent de sa principale tâche qui est d'enseigner et de bien préparer ses cours pour être prêt à plusieurs éventualités, cet être hors du commun doit tenter de conserver en toutes circonstances sa bonne humeur, son enthousiasme et un sens aigu de la diplomatie. Et bien sûr la vigueur du capitaine sans quoi les matelots déconnent.


Personnellement, ce n'est pas de formation, mais de temps et d'expérience que j'ai eu besoin pour apprendre à interagir avec des ados décapants et apprendre les codes du métier pour ne pas varloper les sensibilités de certains collègues. Bref, on sous-estime ce que donne l'expérience. On manque à la limite de supervision dans ce métier parce que tout le monde est trop occupé pour avoir du temps pour échanger. Mais on s'en donne tout de même de ce temps précieux du partage quand l'équipe est valable, capable de s'entraider, de se serrer les coudes. Et malheureusement, les profs de l'autre générations sont partis massivement en nous abandonnant à la réforme (et à la nouvelle grammaire !) au lieu de passer le flambeau.

En somme, la formation fait vivre des formateurs, je ne suis pas sûr que ça aide à devenir meilleur prof.


On laisse entendre avec le refrain des formations qu'on n'apprendrait rien par soi-même. Toute la réforme prétend le contraire pour les jeunes apprenants aujourd'hui. Ce qui est dans leur cas navrant parce que c'est justement de formation de base qu'ils ont besoin, pas de se lancer dans des pratiques sans outils.


La plupart des profs ont reçu une formation intellectuelle qui les équipe pour lire, apprendre des autres et réfléchir dans le cadre de leur pratique. Un prof qui prend à cœur son travail se renouvelle sans cesse au rythme qu'il peut. Oui, oui, je vois des collègues déprimés à l'occasion se faire des patiences dans les salles d'informatique au lieu d'être en arrière de leurs élèves pour les pousser à se dépasser. Mais ce n'est pas la formation qui va changer quoi que ce soit à ça. Non, c'est l'indulgence du système, c'est le directeur qui ne se promène pas dans son école, qui n'est même pas un exemple pour les autres, qui se fout que des jeunes entrent en bafouant son code de vie dans l'école le matin, qui n'est pas posté à surveiller que son école et l'éducation qu'on y donne soit pris au sérieux. Il pourrait simplement être là le chien de garde de la qualité. Les profs déprimés ont besoin souvent d'encouragement, d'un ordre autour d'eux, dans la bâtisse où il travaille, dans l'équipe qui est là, d'une ambiance organisée et cohérente, qui se tient. Non ce n'est pas de cet utopique ordre professionnel dont il rêve, ce prof déprimé, qui n'est plus actif pendant ces minutes de répit volées à sa mission. Mais du moyen de pouvoir faire la classe à ses jeunes capables pour le moment pourris par la présence d'élèves souvent en troubles divers qui viennent créer un bruit et un chaos qui empêche de faire classe. Pourris par un matériel pédagogique franchement inutilisable. Pourris par une philosophie d'éducation qui pensent qu'il suffit de mettre des jeunes devant un ordi pour qu'ils apprennent, alors que c'est un combat en réalité de chaque minute pour les garder concentrés sur un objectif planifié d'apprentissage.

Bref, un ordre professionnel, c'est loin d'être une panacée. Un ordre satellite pour gérer le chaos ambiant est presque de la pensée magique.

Non, l'éducation doit d'abord enrayer le mensonge, vieille topique en passant, et arrêter d'avoir une approche client qui paye et utilise. Apprendre suppose un investissement de l'apprenant, une part active et c'est souvent ce qui fait défaut et ce n'est pas en écoutant les doléances des petits pits qui cherchent à en faire le moins possible pour finalement pratiquement ne rien apprendre qu'on va augmenter le sérieux dans la profession.

Qu'on arrête de programmer l'impossible et de faire semblant d'évaluer au lieu d'exiger un PDF qui tient compte des capacités des jeunes. Pris dans ce grand mensonge, il est de plus en plus difficile de faire notre travail raisonnablement.

Investir dans les enfants en difficulté alors qu'on les a «dumpé» dans la classe ordinaire en déconstruisant la structure des classes adaptés est le vœux pieux de tous les politiciens depuis qu'ils ont tout démoli. C'est depuis ce temps-là qu'on nous dit ne pas être assez compétents parce que des connards dans certaines universités dans les années 90 ont affirmé que des «superprofs» seraient capables d'intégrer dans des classes à 30 élèves tous les EHDAA pour le bénéfice de tous. ET tout cela est arrivé à cause de tous ceux qui ont vu l'économie: quoi, on n'aura plus besoin d'un double ratio avec les EHDAA?

Y a jamais eu d'époque parfaite en éducation, mais notre temps est loin d'être la meilleure période qu'on ait vécu dans nos écoles...

Un peu partout avec l'atmosphère de disette de plus en plus palpable avec les années, on s'arrange avec les moyens du bord. ET c'est loin d'être idéal.

Si on veut redorer le blason des enseignants, ce n'est pas nécessairement en augmentant le salaire qu'on y arrivera, mais en admettant pas que n'importe quel quidam qui ne fait pas ce métier se permette de venir nous dire comment le faire. Que nos directions arrêtent de saper notre autorité, commence à incarner la leur propre, que le ministère arrête de nous prendre pour des imbéciles dont la tâche première est de donner une «bonnes notes» aux jeunes. Qu'on arrête de nous rendre responsable de tout.

Quand on aura compris qu'un jeune cherche avant tout à affirmer son identité et teste très souvent son pouvoir sur les adultes, on verra que les approches qui permettent de mettre un peu d'ordre pour permettre la concentration sur les apprentissages à l'école sont celles qui donnent aux enseignants une certaine autorité effective. Qui permettent à l'enseignant d'être respecté dans les choix qu'ils posent pour faire avancer ses groupes. Outre que chaque prof a besoin de développer son pouvoir personnel pour arriver à s'imposer comme figure d'autorité, il faut qu'autour une certaine structure l'autorise. Il faut un système crédible qui arrête de rejeter la faute sur les autres. 


Il faut aussi arrêter de pratiquer la folie de la réussite à tout prix et reconnaitre que parfois le courage est de dire à la personne devant soi que ses caprices et son inaction sont tout à fait incohérents avec le projet d'apprendre. Il faut sortir les jeunes de la pensée magique et leur faire apprécier la relation qu'il y a entre les efforts qu'ils donnent et leur réussite. 

Dans l'univers actuel, il y a plein de jeunes qui ne sont plus capables de poursuivre leur apprentissage avec les retards qu'ils ont accumulé avec les années. Qu'on arrête de gémir et qu'on reconnaisse enfin que le système de la promotion automatique et l'économie des services adaptés n'aident personne à grandir.


C'est tout un système assez déglingué qui est honnêtement à revoir. 


Mais on peut croire en la formation et en l'ordre professionnel. Il y a toujours des adeptes à trouver pour chaque philosophie.

samedi 10 mars 2012

Ah oui, à propos de la persévérance en hausse

Ça va bien faire 4 ans que la loi 88 est en place. Bref, tranquillement, on s'est mis à signer dans les écoles des conventions de gestion pour la réussite éducative qui demandent de chiffrer des améliorations de la réussite.


Et est-ce qu'on réussit à atteindre ces objectifs?


Je soulève le point parce que, simplement, avant que je passe dans mon bled, tout le monde ou presque réussissait au secondaire en français, sauf ceux qui exagéraient dans les absences, c'est-à-dire être en gros plus de la moitié du temps absent. Même que les jeunes par ici l'an dernier avaient toujours la même note ou presque dans les 3 compétences: 65, 65, 65, par exemple, détail qui m'avait franchement intrigué, je dois dire.

Moi, évidemment, je suis un très mauvais prof parce que, quand je mets des conditions d'examens,  les jeunes, devant des exigences de niveau,  ne réussissent pas en général, présent ou pas. Et je nuance un peu dans la force des compétences, on devinera. A titre d'exemple, mes jeunes réussissaient l'an dernier en secondaire 4 dont un avec une moyenne de 71%. Il ne fait pas un 7% dans un examen de lecture de type prototype d'examen du Mels de 5e secondaire qu'un organisme m'a demandé de lui passer. Il fait 48 % et 35 %, point boni compris, dans mes petits examens d'étape nullement comparables sur un texte de 2-3 pages. A l'écrit, en étirant tout ce qu'on peut étirer, on peine à atteindre un 50% dans un texte descriptif et en argumentatif, il n'est toujours pas capable de me pondre la moindre chose... On est dans les 40 fautes d'orthographe et la vingtaine et plus de phrases syntaxiquement fautives pour un texte de 400-500 mots.


Mais si je veux améliorer la réussite scolaire, c'est super facile. Je lis la première phrase d'une copie d'écriture, je ferme les yeux, je lis la dernière phrase et je note ce que j'ai vu en laissant une marge pour ne pas avoir de trouble avec personne. Je mets un super commentaire positivant pour entretenir la persévérance tant qu'à y être. De toute façon, avec cette technique, on se dégage du temps pour bien faire les choses! On peut appliquer une technique du genre en compréhension de texte. Et évaluer le niveau oral en suçant son pouce et en le levant au vent aussi. Je m'inspire d'un commentaire vu ici (article intéressant sur la réunionnite et sur une conception du volontariat enseignant pour aider l'Éducation nationale selon Sarcozy, plus bas en commentaire).

On peut en valider des compétences en un temps record si on s'en donne la peine.

Même le ministère nous aide à améliorer la réussite pour atteindre 80% de réussite scolaire. Elle le fait déjà d'ailleurs en faisant passer environ 80 % des moins pires copies peu importe le nombre de fautes. Je ne peux m'expliquer le 60% d'un des membres de ma famille il y a deux ans en français assez en difficulté sur cette question. Et la lecture d'un document technique qui parlait de maintenir les moyennes historiques des examens en math de 4e secondaire par la modération des résultats me laissent penser la même chose.

Fait que bref, avec les panneaux réclames du Mels comme ceux-ci, et ce que j'observe dans ma réalité, j'ai mon gros doute sur un certain nombre de choses en éducation.

mardi 6 mars 2012

Relâche: déjà mardi! Alors je réfléchis au parcours de l'année qui n'est pas très brillant....

Ben oui, hier j'y pensais aussi déjà, qu'à matin, ce serait déjà mardi.

Je commence juste à fureter dans des directions que je ne m'autorise pas souvent parce que j'ai tant à faire et besoin de rester en équilibre pour faire mon job. Aussi, je limite les explorations, les activités intellectuelles entre autres trop éloignées de mes contingences quotidiennes. 


Depuis deux jours, j'ai passé au travers un document qu'un ami du web m'avait envoyé il y a bien longtemps sur un sujet qui me captivait mais qui est d'une grande complexité. Le document aussi l'était! Je ne sais pas trop si je peux en parler, mais bon ça a eu l'effet de me ramener à la lecture et à une certaine réflexion.

Parait que je rentre dans la catégorie  des cognitifs pour l'intervenant que j'ai rencontré lors des événements du mois dernier qui m'ont un peu déstabilisés pendant deux trois semaines avec des pointes certains jours. Oui, j'aime cogiter, c'est comme une drogue, comme un espoir de prendre le dessus sur la complexité dans laquelle je nage souvent. Mais c'est aussi comme le sucre que j'ai du mal à gérer.  Une tendance au gavage comme quand on prend une brosse qui me perturbe passablement, fait que je m'abstiens  la plupart du temps. De toute façon, j'ai des intolérances comme pour gérer toute la tolérance dont je dois faire preuve dans mon métier.


Bon, mon métier nourrit bien mon côté cognitif, mais parfois là aussi j'abuse avec mes systèmes que je mets en place et une certaine manière de gérer l'«ingérabilité» des jeunes d'aujourd'hui. Mais bon, ce ne doit pas être si mal adapté que cela. L'an dernier, parait que les jeunes d'ici envoyaient vraiment promener les profs et la prof de français en particulier. Là, ça se gère. Des incidents, des caractères désagréables, des tentatives d'intimidation ici et là, je ne me laisse pas démonter. L'équipe se tient. Enfin, ça relativise les critiques de surface de jeunes qui me reprochent de ne pas leur payer le café ou de les sortir pour une marche ou de les emmener jouer au ping pong au lieu de tenter de les amener à faire du français. Ça relativise aussi le violon de l'autre qui est toujours à me chanter la nostalgie de la prof de l'an dernier. Nostalgie de pouvoir faire son numéro de diva sans contrainte plus probablement. 


Mais bon, même si je vois de très bon développements chez les quelques élèves rares à avoir des dispositions pour l'apprentissage et même qu'une en particulier m'a assez épaté dans le petit texte de l'examen d'étape où je demandais de décrire un des explorateurs sur lesquels nous avions lu pendant l'étape, je m'interroge sur la suite à tenir. J'ai encore franchement, globalement, un échec  retentissant devant les yeux en ce qui a trait à la capacité que j'ai eu à tirer l'ensemble des élèves plus loin. Deuxième bulletin et deuxième raz de marée d'échecs. Mon secondaire 5 est complètement ravagé. Ils ne font rien de ce que je leur demande. Ils brettent. Grosso modo, le même portrait qu'à la première étape. Je suis trop exigeant, on dirait. Ou mes examens trop difficiles. Je devrais simplement ne rien leur demander, comme ça il ne ferait rien et ça passerait!


Ici, bien des élèves ne prennent même pas la peine de  finir les examens. Je reçois plein de copies à moitié vide ou moitié plein pour les optimistes. Ça coule pareil! Je ne sais pas combien de jeunes n'ont pas fait la partie écrite de mes examens. J'en ai plein qui n'ont pas préparé l'oral. Qui ne l'ont pas fait finalement. 


En près de 10 ans de carrière, étalés sur plus de 15 ans, je n'ai jamais vu autant des jeunes s'en taper. Rien ne les effraie, rien ne les intéresse vraiment. Ils sont rébarbatifs à tout ou à peu près.  Plusieurs sont gelés la plupart du temps. L'absentéisme est courant, banal ici et l'absence de travail avec présence quotidienne tout aussi banal. L'an dernier, dans une autre communauté du genre, j'avais au moins un peu plus de réponse. Les jeunes se souciaient un peu de la note, des travaux à faire, de réussir. Même si le rythme était lent, ils bougeaient. Là... 

Ici, j'ai 4-5 élèves avec un certain talent et 4-5 autres moyens-faibles, bref un dizaine sur les 32 du secondaire qui ressemblent à des  élèves qui sont là pour apprendre quelque chose ou enfin qui se prêtent à la convention de l'école: un prof donne des travaux pour faire des apprentissages et le jeune se met en action avec ou sans aide pour les réaliser et faire ses apprentissages.  Ici, il manque le «se met en action» du jeune.


En secondaire un et deux, j'arrive parfois à animer parce que j'ai les groupes séparés. C'est pas miraculeux, loin de là, mais au moins, je les fais réfléchir un peu, même s'il faut être ben patient! Au deuxième cycle, avec mes groupes qui sont jumelés sur trois niveaux, c'est une autre paire de manches . Animer un groupe, c'est arrêter les autres. Alors, j'individualise beaucoup, fais très peu de magistral, mais plusieurs ne bougent pas des cours durant. Et ici, on a beau nous demander de donner des devoirs et j'en donne quelques-uns, rien ne se fait ailleurs qu'en classe pour la plupart des jeunes. Avec des travaux à démarches plus longues, on ne s'en sort jamais. 


Fait que c'est un peu démotivant ces derniers temps. J'ai beau me gratter la tête dans tous les sens, je ne sais pas vraiment ce que je vais faire. Lire, c'est trop compliqué, écrire on n'en parle pas, faire de la grammaire où ils arrivent parfois à piger le pattern, c'est plate. La bibliothèque, un lieu pour jaser de gros chars avec des bouquins de gros chars. L'informatique, un cours de surf, ou de copier-coller (prendre des notes, c'est quoi ça?) où on attend les 10 dernières minutes pour enfin «facebooker».


Je suis dans un dilemme: je fais ou je ne fais pas les programmes? Je lâche mes rares bons élèves pour tenter de m'occuper des autres en leur donnant des activités accessibles? J'arrive toujours à la conclusion que de descendre les exigences ne changera rien et, en plus, je perdrai les jeunes qui sont capables.  


La différenciation? Remède miracle, y a juste un tracas: sans l'adhésion à la convention de l'école où «un jeune se met en action» dans des activités d'apprentissage avec ou sans aide, comment y arrive-t-on?


A côté de ce constat que bien des jeunes s'arrêtent à un niveau d'ignorance, je suis là moi à me creuser les méninges sur des réflexions sur l'espèce humaine dans les SF que je grapille. Parfois je me dis que l'espèce humaine qui évolue concerne peu de gens. Évoluer, pour la majorité, c'est avoir un profil de FACE... de ce temps-ci et de participer aux réseaux sociaux. Ça, mes jeunes en sont déjà capables...

dimanche 4 mars 2012

Relâche...

Un battement de cil, un pet! Que je lis chez les autres...

C'est vrai, c'est court. Mais je l'avais rêvé, peut-être cette année, plus que les autres. Ma conjointe, c'est sa première année, me dit qu'elle ne se sent pas en vacances. Lundi peut-être, quand on ne rentrera pas au boulot. Moi, hier déjà en me levant, le champ de force du lundi qui vient, des urgences à résoudre, tout cela, c'était loin déjà. 

Bon, moi aussi, j'ai un hamster, mais bon, je ne m'énerve plus avec lui. Je lui donne de la place des fois. Puis, je retourne à mes rêveries, mes petites préoccupations. Hier, je suis allé faire mon tour en motoneige à la  «dump» En régions éloignées, c'est comme un Canadian Tire, des fois même un Wal Mart à ciel ouvert tant les gens jettent des trucs  encore tout à fait utiles et en condition. Je cherchais de quoi mettre sous mes patins de traineau qui en arrachent depuis que mes bandes de crazy carpet trop faibles se sont émiettés. J'ai finalement trouvé des espèces de sangles métalliques noires exceptionnellement larges qu'on utilise pour attacher les marchandises. J'ai mis ça dans le traineau avec un ballon de football américain que j'ai trouvé (que je lancerai peut-être au chien l'été prochain ou à un de mes gars qui viendra avec moi jouer au nomade dans mon camper une coupe de jours). Pis j'ai été au Labrador! Ici, c'est à côté... pour voir le village minier. J'ai fait des kilomètres dans un paysage de mines à ciel ouvert enneigées. Je me suis retourné quand j'ai vu les affiches qui prévenaient des «blasts».

Revenu à la maison, dans deux séances entrecoupées d'une sieste et d'un film, j'ai passé une coupe d'heures à me battre avec les sangles, avec les mèches de ma perceuse, à  mutiler mon poinçon, à échanger une mèche contre une «bite» à tête carré 8 pour visser à -20 degrés mes vis à plancher, avec du vent et de la neige. Mettons que le «hamster» s'engourdit comme mes doigts! Bref, mes patins sont sanglés et le tout glisse bien.


Aujourd'hui, je retaperai bien la boite que je mets sur le traineau dont l'armature trop faible ne supporte pas bien les secousses de mes petites expéditions, mais il fait encore -42 avec le vent dehors. Je commence à avoir l'habitude du gros frète, mais là... Mes rallonges vont devenir moins flexibles, à la limite cassantes, c'est dure sur tout les -40! Il fait super beau, mais le soleil n'est pas chaud!


Faque je poirote sur Internet comme mes contemporains, c'est pratique, ça occupe. Bon, le hamster me ramène vite dans les petites controverses éducatives, déformation. Le cellulaire fait jaser. Cet objet qui devient un pilier identitaire pour la jeunesse qui s'en cherche une. Bon, ici, on est pas trop dérangé par les textos, quoique je soupçonne que même si les jeunes n'ont pas l'accès au réseau, ils peuvent s'en faire un entre eux. Mais je n'ai pas de preuves. Comme une intuition l'autre jour. Ben oui, on est dépassés par tout ça, parce que je n'ai pas besoin de tout ça pour vivre simplement, honnêtement. J'ai mon Visagemachin depuis cet été, histoire de voir ce que ça fait, pour quelques liens avec des collègues et amis et certains membres de ma famille, mais ça s'arrête là, les twittomanies dans ma vie. Les zozotages. Une mère au bar du village me demandait si j'étais sur le Livre des visages pour communiquer au sujet de sa fille, je lui ai donné mon mail et dis que le je limitais un peu les «faces» poliment. J'ai beau vivre au milieu d'une société où tout le monde se connait et où tout le monde est toujours en relation avec tout le monde, je ne suis pas un gars de la gang pareil, enfin c'est très occasionnel de me mêler et d'avoir à ce point besoin des autres.


Simplement, je ne pourrais pas avoir le temps de respirer si je devais me lancer tout le temps dans ce genre de conduites addictives, me dit mon hamster. Donc, je restreins, je deviens un illettré technologique par refus d'un mode de vie qui est pour moi abêtissant. Je ne connais pas la kyrielle d'applications intéressantes qui pourrait enrichir les travaux de mes étudiants. Je n'ai pas encore de «touch» machins entre les doigts qui devient la nouvelle plastique à la mode dans les visuels de la télé. Bon, l'autre jour, le Ipad fournit à l'éducatrice m'a donné l'exposé oral filmé de la jeune que je ne peux approcher comme si j'avais une tare bizarre depuis qu'il lui est passé par la tête que j'étais un «mononcle» obsédé et qu'elle a décidé d'en faire un certaine promotion. A fallu qu'on m'explique comment déverrouiller le machin d'un coquet coup de pouce vers la droite. J'en suis toujours à mon Vista édition familiale acheté en décembre 2008 sur mon portable qui fait très bien le gros de la job que je lui demande de faire, les autres environnements me ne sont pas familiers. Quand je sors je réactive mon cell Virgin assez de base qui fait aussi la job dont j'ai besoin quand je me trimbale. 


On est tous dans des vitesses différentes d'intégrations de ces changements simplement parce que, câline, je ne vais pas m'acheter le dernier bidule machin tous les quatre matins. J'aurai certainement un touch machin un jour. Et puis l'autre machin 3 D qu'on n'a pas encore mis en marché. Mais, pour l'instant, c'est un peu incroyable que la société me demande d'être un conseiller avisé pour mes jeunes, quand je n'ai pas encore manié la technologie qu'ils se procurent au gré des cycles de la consommation. Je suis un prof de français, pas un conseiller en éthique pour les TICS. Je ne fais pas de projets Twitter parce que je ne m'intéresse pas à ça, les «one-liner» à chauds des gens ou aux vedettes qui se gardent branchés à leurs groupies. J'élimine même des préférences dans mon profil de Face... (!) pour ne pas alourdir mes murs de bruits inutiles que je n'ai pas demandés à recevoir ni emmerder la galerie des amis. Des profils de Face... de personnages, c'est bien, mais mettons que ça relativise la valeur des possessions de M. Zuckerburg, dont j'ai vu le film qui s'en inspire, avant-hier. J'avais pensé à multiplier mes profils pour gérer différents besoins et me disait que des gens devait le faire, d'ailleurs j'ai vu cela chez des collègues. 


Bon, faudrait lâcher le hamster!


Je me suis mis un coupe de bouquins dans le chemin. J'ai les T4 à entrer dans le logiciel. Faut que je brave le froid pour quelques courses cet aprem. Faudrait que je regarde à me reprendre sur mon rôle de parent-hélicoptère, ou parent-mail-téléphone très très occasionnel. Mon gars s'est peut-être trouvé un job pour pouvoir s'acheter enfin un outil pour développer son identité sociale! Lui qui n'en a certainement aucune! Franchement! Il est plutôt le genre à se retrouver président de conseil étudiant sans tout cela... Bon, j'espère qu'il continue de s'éclater dans sa nouvelle école qui me ponctionne de coquettes sommes. 


Ah, les vacances, c'est court, mais ça fait du bien!