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mardi 6 mars 2012

Relâche: déjà mardi! Alors je réfléchis au parcours de l'année qui n'est pas très brillant....

Ben oui, hier j'y pensais aussi déjà, qu'à matin, ce serait déjà mardi.

Je commence juste à fureter dans des directions que je ne m'autorise pas souvent parce que j'ai tant à faire et besoin de rester en équilibre pour faire mon job. Aussi, je limite les explorations, les activités intellectuelles entre autres trop éloignées de mes contingences quotidiennes. 


Depuis deux jours, j'ai passé au travers un document qu'un ami du web m'avait envoyé il y a bien longtemps sur un sujet qui me captivait mais qui est d'une grande complexité. Le document aussi l'était! Je ne sais pas trop si je peux en parler, mais bon ça a eu l'effet de me ramener à la lecture et à une certaine réflexion.

Parait que je rentre dans la catégorie  des cognitifs pour l'intervenant que j'ai rencontré lors des événements du mois dernier qui m'ont un peu déstabilisés pendant deux trois semaines avec des pointes certains jours. Oui, j'aime cogiter, c'est comme une drogue, comme un espoir de prendre le dessus sur la complexité dans laquelle je nage souvent. Mais c'est aussi comme le sucre que j'ai du mal à gérer.  Une tendance au gavage comme quand on prend une brosse qui me perturbe passablement, fait que je m'abstiens  la plupart du temps. De toute façon, j'ai des intolérances comme pour gérer toute la tolérance dont je dois faire preuve dans mon métier.


Bon, mon métier nourrit bien mon côté cognitif, mais parfois là aussi j'abuse avec mes systèmes que je mets en place et une certaine manière de gérer l'«ingérabilité» des jeunes d'aujourd'hui. Mais bon, ce ne doit pas être si mal adapté que cela. L'an dernier, parait que les jeunes d'ici envoyaient vraiment promener les profs et la prof de français en particulier. Là, ça se gère. Des incidents, des caractères désagréables, des tentatives d'intimidation ici et là, je ne me laisse pas démonter. L'équipe se tient. Enfin, ça relativise les critiques de surface de jeunes qui me reprochent de ne pas leur payer le café ou de les sortir pour une marche ou de les emmener jouer au ping pong au lieu de tenter de les amener à faire du français. Ça relativise aussi le violon de l'autre qui est toujours à me chanter la nostalgie de la prof de l'an dernier. Nostalgie de pouvoir faire son numéro de diva sans contrainte plus probablement. 


Mais bon, même si je vois de très bon développements chez les quelques élèves rares à avoir des dispositions pour l'apprentissage et même qu'une en particulier m'a assez épaté dans le petit texte de l'examen d'étape où je demandais de décrire un des explorateurs sur lesquels nous avions lu pendant l'étape, je m'interroge sur la suite à tenir. J'ai encore franchement, globalement, un échec  retentissant devant les yeux en ce qui a trait à la capacité que j'ai eu à tirer l'ensemble des élèves plus loin. Deuxième bulletin et deuxième raz de marée d'échecs. Mon secondaire 5 est complètement ravagé. Ils ne font rien de ce que je leur demande. Ils brettent. Grosso modo, le même portrait qu'à la première étape. Je suis trop exigeant, on dirait. Ou mes examens trop difficiles. Je devrais simplement ne rien leur demander, comme ça il ne ferait rien et ça passerait!


Ici, bien des élèves ne prennent même pas la peine de  finir les examens. Je reçois plein de copies à moitié vide ou moitié plein pour les optimistes. Ça coule pareil! Je ne sais pas combien de jeunes n'ont pas fait la partie écrite de mes examens. J'en ai plein qui n'ont pas préparé l'oral. Qui ne l'ont pas fait finalement. 


En près de 10 ans de carrière, étalés sur plus de 15 ans, je n'ai jamais vu autant des jeunes s'en taper. Rien ne les effraie, rien ne les intéresse vraiment. Ils sont rébarbatifs à tout ou à peu près.  Plusieurs sont gelés la plupart du temps. L'absentéisme est courant, banal ici et l'absence de travail avec présence quotidienne tout aussi banal. L'an dernier, dans une autre communauté du genre, j'avais au moins un peu plus de réponse. Les jeunes se souciaient un peu de la note, des travaux à faire, de réussir. Même si le rythme était lent, ils bougeaient. Là... 

Ici, j'ai 4-5 élèves avec un certain talent et 4-5 autres moyens-faibles, bref un dizaine sur les 32 du secondaire qui ressemblent à des  élèves qui sont là pour apprendre quelque chose ou enfin qui se prêtent à la convention de l'école: un prof donne des travaux pour faire des apprentissages et le jeune se met en action avec ou sans aide pour les réaliser et faire ses apprentissages.  Ici, il manque le «se met en action» du jeune.


En secondaire un et deux, j'arrive parfois à animer parce que j'ai les groupes séparés. C'est pas miraculeux, loin de là, mais au moins, je les fais réfléchir un peu, même s'il faut être ben patient! Au deuxième cycle, avec mes groupes qui sont jumelés sur trois niveaux, c'est une autre paire de manches . Animer un groupe, c'est arrêter les autres. Alors, j'individualise beaucoup, fais très peu de magistral, mais plusieurs ne bougent pas des cours durant. Et ici, on a beau nous demander de donner des devoirs et j'en donne quelques-uns, rien ne se fait ailleurs qu'en classe pour la plupart des jeunes. Avec des travaux à démarches plus longues, on ne s'en sort jamais. 


Fait que c'est un peu démotivant ces derniers temps. J'ai beau me gratter la tête dans tous les sens, je ne sais pas vraiment ce que je vais faire. Lire, c'est trop compliqué, écrire on n'en parle pas, faire de la grammaire où ils arrivent parfois à piger le pattern, c'est plate. La bibliothèque, un lieu pour jaser de gros chars avec des bouquins de gros chars. L'informatique, un cours de surf, ou de copier-coller (prendre des notes, c'est quoi ça?) où on attend les 10 dernières minutes pour enfin «facebooker».


Je suis dans un dilemme: je fais ou je ne fais pas les programmes? Je lâche mes rares bons élèves pour tenter de m'occuper des autres en leur donnant des activités accessibles? J'arrive toujours à la conclusion que de descendre les exigences ne changera rien et, en plus, je perdrai les jeunes qui sont capables.  


La différenciation? Remède miracle, y a juste un tracas: sans l'adhésion à la convention de l'école où «un jeune se met en action» dans des activités d'apprentissage avec ou sans aide, comment y arrive-t-on?


A côté de ce constat que bien des jeunes s'arrêtent à un niveau d'ignorance, je suis là moi à me creuser les méninges sur des réflexions sur l'espèce humaine dans les SF que je grapille. Parfois je me dis que l'espèce humaine qui évolue concerne peu de gens. Évoluer, pour la majorité, c'est avoir un profil de FACE... de ce temps-ci et de participer aux réseaux sociaux. Ça, mes jeunes en sont déjà capables...

1 commentaire:

Louise a dit…

C’est dur dur de rester conscient. On tient bon pour ceux et celles pour qui on a choisi de faire ce métier. Cette année j’en ai beaucoup de ces jeunes à qui j’ai pu transmettre ma passion. Ça me ‘’rebouste’’ pour une autre année. La vingt et unième. Mais si je gagnais au loto, je n’y retournerais pas. C’est dommage!