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jeudi 25 mars 2010

Le conflit cognitif: le provoquer ou l'éviter? Ou pourquoi beaucoup de profs et d'élèves perdent leur temps!

Je réfléchis ici à ce concept. Je ne suis pas un spécialiste de Piaget d'où il nous vient. Non, j'ai été initié à sa théorie il y a longtemps dans mes cours de psychologie, car c'est un théoricien marquant et incontournable dans l'histoire de la compréhension du développement de l'intelligence.

En bref, Piaget, l'idée du conflit cognitif et le constructivisme de la réforme

C'est généralement de sa théorie constructiviste qu'émane ce concept pour comprendre l'aspect dynamique de sa théorie du développement de l'intelligence. Au cours de ses études de cas de quelques enfants dont les siens, Piaget est amené à formuler une théorie de développement en stades progressifs, caractérisés par diverses opérations cognitives qui vont être peu à peu développées par l'enfant dans l'interaction avec son environnement physique et sociale.

Bon, je ne veux pas refaire la théorie de Piaget, mais m'arrêter à un de ces concepts que les socio-contructivistes ont repris à leur compte et qui, dans le cadre de leur théorie, m'apparaît être dénaturé, voire complètement détourné de son sens. Et ce détournement ou cette profonde incompréhension est à la source des déboires de l'approche sociocontructive auprès des élèves réguliers et de  ceux en difficulté d'apprentissage. Pire, je dirais que le manque de prise en compte de cette réalité dans le processus visant à développer des compétences dans des contextes signifiants est à la source de beaucoup de perte de temps en enseignement (les jeunes n'apprennent pas ou ne retiennent pas) et provoque une démotivation devant des tâches trop complexes. La pédagogie de projet et celle de la découverte manque donc à mon sens de considération envers une réalité de l'esprit sur laquelle on aurait avantage à se documenter. L'enseignement explicite est l'approche moderne qui s'attache par tous les moyens à contrer l'effet négatif sinon salvateur du conflit cognitif qu'il vaut mieux apprendre à doser avec tout le support et l'attention que cela implique.
 

Le concept de conflit cognitif parle simplement du fait que l'enfant se retrouve parfois devant des situations qui exigent de lui d'aller au delà  de son fonctionnement jusque-là acquis au plan cognitif. Plus vif ou saillant est le conflit cognitif, selon des recherches, plus l'appareil intellectuel est poussé à se réorganiser pour développer une réponse (accommodation) appropriée à la situation stressante. Puis, à force de répéter l'expérience, l'appareil intellectuel va assimiler le nouveau paradigme, la nouvelle connaissance. Bon, généralement, ce genre d'observation a été faite dans des contextes somme toute assez simples, en fait peu propice à mettre l'enfant en dépression en développant un sentiment d'impuissance face à la tâche ou plus modérément d'évitement protecteur (démotivation). Non, on a observé cette réalité souvent dans des petits contextes mignons comme des expériences sur la conservation des quantités. L'enfant, qui n'a pas intégré certaines informations encore, peut faire des erreurs d'appréciations s'il n'apprend pas à tenir compte de certains aspects importants pour l'évaluation de différentes quantités d'eau dans des récipients de différentes formes. Généralement, on confronte en fait l'enfant à la réalité de son erreur en expérimentant. Par exemple, quand on prend deux verres d'eau de formes différentes, il est facile d'induire une illusion: celui qui est plus haut et effilé aura l'air d'en contenir plus qu'un  récipient trapu. Si on fait transvider les contenus dans des cylindres identiques pour une meilleure appréciation, le jeune peut alors être contraint d'admettre qu'il a fait une erreur d'appréciation. Puis, on lui donne des informations supplémentaires de compréhension pour permettre de saisir les nouveaux paramètres à tenir compte comme l'idée du volume pour arriver à une meilleure évaluation des quantités.

Bref, rien  de traumatisant. Encore qu'il faille qu'il ait atteint un certain âge pour être capable d'intégrer cette conservation des quantités.

Bref, ce concept a justifié le mouvement socio-contructif de postuler que l'immersion d'un jeune dans une situation problématique le poussant à vivre un conflit cognitif allaient finalement l'amener à apprendre, d'où on découle la pédagogie de projet avec immersion dans des situations complexes.

Un autre son de cloche: les recherches en Direct instruction (enseignement explicite)

Or, la recherche expérimentale comme en témoignent de très nombreuses revues de littérature montre justement que l'apprentissage doit plutôt tenir compte de la capacité limitée de l'appareil cognitif de traiter de l'information nouvelle. En fait, il semble que des séquences avec unités simples adroitement agencés en passant du simple au complexe avec maîtrise de chaque étape permet davantage de bâtir ou construire des apprentissages solides. Des approches très structurées comme le Direct instruction (ou enseignement explicite) ont montré dans de très nombreuses études une supériorité manifeste sur toutes les approches de découverte de type socio-constructiviste à pédagogie de projet. La modèle pédagogique de l'enseignement explicite est assez simple: Modelage (démonstration, explications),Pratiques dirigées (mise en pratique ou exercice du modèle souvent en équipe), puis Pratique autonome (L'élève qui sait comment faire met en pratique par lui-même).

Dans cette approche, on se soucie de faire des petites unités de présentations, en partant des connaissances antérieures, qu'on va réactiver, et ré-enseigner s'il le faut, en laissant même le temps de reposer un peu pour ne jamais surcharger la capacité de la mémoire de travail. Car, on sait qu'une surcharge ne favorise jamais une mise en mémoire à long terme. On travaille aussi finalement avec la réalité biologique du cerveau. Quand on apprend, le cerveau réorganise le réseau neuronal et cela se complète souvent dans le sommeil. Bref, il est bien de ne pas surcharger et de séparer la tâche et d'ajourner même au lieu de vouloir trop donner d'informations à la fois. (Je note souvent chez mes collègues cette réflexion redondante: «Je ne comprends pas, j'ai enseigné tout cela et ils ne se souviennent de rien.»  La surcharge de l'enseignement, l'exhaustivité des présentations, des livres, des manuels, le manque d'attention aux préalables, le manque d'exercices permettant l'acquisition, tout cela serait à explorer. Mais la mode à l'exhaustivité universitaire déversée dans le  primaire et le secondaire sans mentor pour rappeler à l'ordre les gens qui commettent ces erreurs évitables, est selon moi à la source de beaucoup de gaspillage de temps d'enseignement aux conséquences inconcevables.)

S'il ne faut pas surcharger l'esprit de nouvelles informations, est-ce à dire qu'on va négliger l'acquisition d'apprentissages complexes? Absolument pas, dans les approches explicites, on s'occupe des connaissances déclaratives (quoi faire), procédurales (comment?) et conditionnelles (quand?), mais toujours dans un souci d'enseigner en rendant les stratégies explicites en montrant en action comment faire et toujours en morcelant le contenu et en donnant le temps aux apprenants d'intégrer l'information.

On remarquera que, dans ces approches, on semble s'attacher justement à susciter le moins de conflits possibles. On fournit en fait beaucoup d'informations, mais à petites doses. D'ailleurs, on fait remarquer que de plonger l'enfant dans un apprentissage s'il n'a pas les préalables peut le plonger dans un sentiment d'impuissance et générer une démotivation importante. Aussi, la phase de mise en situation ou de préparation à l'apprentissage, avec la réactivation des préalables, ré-enseignement si nécessaire jusqu'à maîtrise est une prescription sur laquelle on insiste dans ces approches. Avec même, des mises en garde: donner un peu de temps entre le réenseignement des préalables et les nouveaux enseignements pour permettre à l'apprenant d'intégrer et ne pas surcharger la mémoire de travail, qui sans cette précaution ne va pas bien mettre en mémoire à long terme les nouveaux contenus appris.

La surcharge est contreproductive, qu'on se le dise!

Provoquer ou éviter le conflit cognitif?

Il est curieux de constater une telle divergence dans la vision de l'enseignement autour de cette notion aussi importante et me vient donc cette question: doit-on provoquer ou éviter le conflit cognitif?

Si l'on en croit la revue de littérature  de Bissonnette, Richard et Gautier (2006), " L'une des conséquences [de l'existence de hiérarchies d'apprentissage et de séquences d'acquisitions] est la mise en place de séquences d'enseignement respectant le principe du simple au complexe. Comme le soulignent, Péladeau et collaborateurs (2005), l'efficacité d'une telle séquence a été démontrée à de nombreuses reprises (Anderson, 1968; Caruso et Resnick, 1971; Resnik, Siegel et Kresh, 1971; Mattoon, 1992; Scandura, 1966). Toutefois, «Dans une recension des études empiriques sur le transfert, Baldwin et Ford (1988) concluent qu'une méthode d'enseignement globale à partir de mises en situation complexes peut s'avérer avantageuse uniquement si le niveau d'aptitude de l'ensemble des apprenants est élevé et si le niveau de complexité de la tâche est faible» (Péladeau, Forget et Gagné, 2005, page 22, )." (les gras sont de Bissonnette et al., p.106).

Dans cette revue, on souligne également la supériorité fort documenté de la Direct instruction (DI) sur les pédagogies de découverte utilisant des contextes complexes comme mise en situation, la baisse de la performance du Québec au TEIMS entre 1995 et 2003 pour questionner les prétentions de la réforme, ainsi que l'étude de Théorêt et Al. (2005) dans le Projet Transmaths où on a relevé même des signes clairs de régression dans les apprentissages au terme d'une année de projet.

Au vu de ces résultats, il y a à se questionner sur la pertinence de susciter des conflits cognitifs pour stimuler l'apprentissage et même la motivation à l'apprentissage, car, comme on le note chez les chercheurs, se confronter à une tâche qui dépasse nos capacités peut conduire à un sentiment d'impuissance et à une certaine démotivation.

Cherchez l'erreur?

Au début de ma carrière, j'ai commencé dans le monde des difficultés d'apprentissage dans une école spécialisée. Là, je me souviens, on discutait de la notion de conflits cognitifs et vu que j'intervenais en secondaire 3, il en a été question dans des discussions que j'ai eues avec mes mentors de l'époque. En effet, j'ai remarqué chez certains élèves de drôles de changements dans la période des fêtes notamment une année. Alors que ces élèves demandaient beaucoup de support avant les fêtes, j'avais noté un changement complet de disposition face à certains apprentissages cet hiver-là. Évidemment, l'algèbre en math représente un changement de niveau cognitif de représentation et de certaines habitudes à gérer avec méthodes pour éviter les erreurs de calculs. On a parlé maturation de l'appareil intellectuel et de saut qualitatif qu'aurait créé la répétition d'activités d'un niveau cognitif différent pour expliquer ce changement tout à fait notable. Souvent, on me disait quelque chose comme; « Continue de l'aider, un moment donné, la pâte va lever! Faut que ça mature.»

Cette école avait tout à fait un design curriculaire et pédagogique pensé en fonction des objectifs de fin de parcours du secondaire avec une claire idée des idées maîtresses à «prioriser» pour cette population d'élèves en difficulté avec un lourd passé. C'est de ça qu'on parlait en réunion de matière: de la progression à suivre, des objectifs à atteindre à chaque niveau. Pas de port-folio des réalisations ou des lectures.

En français notamment, chaque discours avait favorisé l'enseignement d'une structure qui préparait aux textes argumentatifs. On modelait, on faisait beaucoup de pratiques, l'utilisation d'organisateurs de pensée étaient une évidence. L'enseignement explicite ou DI était au cœur de la pensée de ces innovateurs dont je garde une claire admiration même si je me souviens pas qu'on évoquait cette approche. Et ça marchait bien sans en faire des élèves exceptionnels, mais simplement des élèves capables d'empocher un DES, eux qui avaient souvent été tous été classés en trouble grave d'apprentissage.

Mais bon, on ne passait pas notre temps à susciter le conflit. Non, en fait, on apportait beaucoup de support, on cherchait avec l'élève, on avait le contexte (15 élèves par classe max), les stratégies les plus susceptibles d'améliorer leur performance en écriture et en lecture. En math, on cherchait les stratégies les plus efficaces pour les enseigner et les faire pratiquer en fonction de leur besoin en fonction de la personnalité du jeune. On ne met pas une stratégie séquentielle à pu finir ou maniaque dans les mains d'un hyperactif mental. Non, on simplifie plutôt la séquence au max. On le contraint à quelques étapes simples. (je me permets une digression  reliée: J'en ai-tu vu moi des démarches longues de matantes choses sorties de l'université qui se retrouvent dans des agendas d'école depuis que je suis sorti de cette école spécialisée? Oh que oui! C'est possiblement juste imbéciles! Mais probablement de l'inconscience pure! Est-on efficace d'offrir ce genre d'outil quand un élève ne comprend pas le trois quarts de mots de la dite démarche ou que l'élève n'a que hâte de terminer sa tâche pour en finir et qu'il saute donc au moins le 3/4 des des 18 étapes de correction de la démarche, et ça, c'est s'il daigne même la lire. Et en terminant, les petits crayons de toutes les couleurs dans l'esprit d'un petit gars, c'est pas toujours cool!).

Je crois qu'il faut développer le concept de l'épuration pédagogique. Il faut trucider le réflexe mal venu d'exhaustivité pour les enfants. La maîtrise est le propre des études supérieures, on peut-tu s'entendre sur ça?!!!

Bref, on cultivait les présentations dépouillées, les organisateurs de pensée simples. Des listes de routines ou de vérification épurées au maximum. On répétait milles fois des expressions simples déclencheurs pour permettre d'activer les stratégies au besoin en situation. Et on exerçait, exerçait, dans tous les niveaux de complexité.

A mon sens, et voilà un début de réponse, le conflit cognitif ne venaient pas d'une stratégie délibérée d'enseignement, mais bien des exigences de la tâche qui, d'année en année, augmentent jusqu'à des points de changements majeurs. Conscient de la description piagétienne du passage des stades opératoires concrets à la pensée formelle, j'ai toujours eu l'impression dans ces niveaux de sec.2 et sec.3 qu'il y avait une augmentation significative de la complexité dont les anciens programmes qui ne me semblaient pas trop mal foutu tenait compte dans un curriculum stratégique. J'enseignais plusieurs matières et j'étais fasciné par les ponts prévus entre les matières: en français, nous abordions le vocabulaire expressif (sentiment, émotion), mais aussi dans le conte où l'on s'attaquait aux mobiles et aux caractères des personnages à l'époque (sans compter l'inconcevable révélateur de dynamique intime que fait ressortir l'écriture de contes de fée) qui s'attaquait à la dimension psychologique de l'être. En même temps, je pouvais m'appuyer sur le cours de morale qui aussi s'attaquait à la relation de soi aux autres dans une ouverture à la réalité psychologique. Évidemment, on changeait pas mal la façon d'appréhender l'être héros d'aventure dans un univers réaliste pour passer au personnage fantaisiste qu'on devait cerner dans ses mobiles pour ne pas finalement créer des invraisemblances même dans des mondes merveilleux. J'insistais donc, ayant en vue aussi que je préparais les jeunes au niveau supérieur où retrouvant le réel dans la nouvelle littéraire, on devrait en plus s'appliquer à narrer une transformation psychologique. Évidemment, quand on sait que l'ado à ces âges explorent le concept d'identité à la recherche d'une vision de lui -même dans ce monde, on sent une certaine cohérence des programmes avec le développement de l'enfant.

Franchement, quand j'ai vu disparaître le texte expressif, qui préfigure une structure argumentative moins rigoureuses, plus vendeuses quoi, je me suis demandé ce que le texte explicatif allait bien nous apporter de mieux. Je cherche encore. Ce que j'ai trouvé, plus tard, et c'est mon interprétation est que la structure de l'explication argumentative est franchement plus obscure et difficile à évaluer, tout à fait complexe, trop en finesse (au point que je me demande qui comprend bien ce genre, je me suis pris dans de grandes discussions sur la question avec une soi-disant journaliste devenue prof (prof masqué n'a aucun rapport avec cette personne); dans les manuels, la structure cause-conséquence-recommandation comme j'en suis venu à la simplifier est souvent un embrouillamini qui se contredit trop pour facilement être enseigné en modèle à des groupes du réguliers! Pour cacher des défauts au nom d'intérêt supérieur, je trouve qu'on a bien manœuvré! Le genre analytique ou explicatif me semble un texte qu'on devrait réserver au Cégep ou à des élèves doués en secondaire 5. Le genre demandent une capacité de se représenter le destinataire à qui l'on explique et de maîtriser une représentation du monde en structure causale qui n'est pas encore très mûre. Mais bon avec de bons élèves, on peut toujours y arriver en autant qu'on a des manuels pas trop tartes qui créent de la confusion.

Et si respecter l'enfant était...

De cette appréciation un peu complaisante, j'en reviens à la notion de conflits cognitifs. Pour moi, il est clair qu'on devrait présenter aux élèves des tâches dans un processus allant du simple au complexe, en tenant justement compte aussi d'une observation de la vie tout à fait fondamentale. On présente à un enfant généralement des défis raisonnables pour son âge.

Tout parent un peu raisonnable sait qu'il vient un temps où chez certains enfants il faut pousser dans le derrière pour qu'il s'adonne à une tâche de leur âge. Ramasser ses jouets par exemple. Si à deux ans, vous chicanez votre enfant sur cette question, vous risquez de le traumatiser si on répète avec insistance la scène surtout si on s'attend à ce qu'il le fasse avec un résultat en ordre. Et ce, pour une raison simple: normalement à cette âge l'enfant n'a pas réussi à cognitivement gérer du classement. Mais bon à 5-6 ans, même si l'enfant ne semble pas très motivé de changer son confort de ne pas démêler lui-même ses jouets, il peut être propice de lui montrer comment faire, de le diriger, puis d'exiger qu'il autonomise sa tâche. Évidemment, il se peut que le tout se vive comme un conflit cognitif. Mais la maturation normale de l'enfant le rend prêt à cette confrontation et vous remarquerez que l'enseignement de la tâche est fortement indiquée.

Conclusion

On le voit, l'intelligence procède par palliers grosso modo. Évidemment, il y a de grandes variétés individuelles et des effets de contextes aussi. Se retrouver à 7 ans dans l'obligation de subvenir à ses besoins dans un contexte de guerre, peut créer chez certains jeunes des accélérations d'acquisition incroyables que des oeuvres et des témoignages ont révélé. On a parlé de résilience. Je dirais peut-être davantage du talent exceptionnel pour l'adaptation. Bien des enfants, dans pareilles situations, sans aide, seraient morts après être tombés dépressifs, dépassés par les événements.

On peut aussi montrer avec des astuces que Piaget avaient tort pour ceci ou cela. J'ai lu récemment que, dans des expériences raffinées, peut-être tirées par les cheveux, on est arrivé à «prouver» que des enfants ont le concept du nombre tout bébé, contredisant la théorie des stades. Je pense à cette expérience qui observe la surprise lue dans les yeux de l'enfant. Quand on lui présente après deux fois 1 nounours, 2 nounours, il ne s'étonne pas. Mais après deux fois un nounours, quand on en présente 3, ses yeux s'écarquillent. Personnellement, moi aussi je m'écarquille les yeux à lire ce genre de stupidités! On n'a pas essayé trois fois le nounours seul et ensuite 3 nounours pour voir. Pis non plus, il n'est venu à personne l'idée de rendre familier le bébé avec l'image de 3 nounours avant de faire l'expérience. Disons qu'on pourrait remarquer des choses surprenantes, enfin j'en ai l'intuition.  Bref, on peut bien insinuer l'idée que les apprentissages ne sont pas toujours absolument linéaires et par paliers et qu'il y a des différences individuelles, et probablement des effets de contextes plus ou moins stimulants ou des dispositions héréditaires, mais en gros, on ne s'attend pas à la capacité de faire du calcul différentiel et intégral à douze ans, même avec les meilleures pédagogues du monde. Et là, j'ai le goût de parler de tradition scolaire pour ce qui est du gros bon sens cognitif des aptitudes des jeunes. Il me semble qu'on aurait avantage à jeter un petit regard en arrière pour mieux avancer!

Bref, avant de plonger les jeunes dans la complexité du monde pour les y perdre, n'avons-nous pas le devoir de les y préparer un peu? Pour lire, on doit apprendre des grilles de compréhension, faire pratiquer des technique, faire intégrer la perception de différence entre des objets complexes comme des genres de textes. Comment sélectionner la forme pertinente d'expression si on ne les a pas un peu étudié au moins quelques-unes pour finalement comprendre un Guide du savoir écrire par soi-même au Cégep. L'école qui outille pour le monde moderne peut-elle se passer des modèles structurants et consistants? On ne peut pas bâtir une école qui fonctionne comme si tous les enfants étaient surdoués et nous faire balancer du «nivellement par le bas» quand on demande un retour au respect des capacités cognitives de l'enfant.


A mon sens, l'erreur de l'exhaustivité, l'immersion dans des contextes trop riches, continuels, à un âge trop jeune, l'utilisation de situation-problèmes trop complexes trop tôt dans la séquence d'apprentissage sont la  conséquence des conceptions erronées véhiculées par cette réforme et ses programmes. Et en bout ligne, nous sommes très nombreux à perdre notre temps et à le gaspiller dans des familles de situations trop complexes pour favoriser quelque apprentissage que ce soit.

La surcharge cognitive est contreproductive, qu'on se le dise!

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