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samedi 19 avril 2008

Bureau jaune et courriel rouge

Je réactualise un texte qui s'était perdu dans un commentaire sur un autre blogue. Je crois important de poser cette hypothèse pour demeurer vigilent! Voici donc ma théorie du complot en éducation!

J'en suis à développer la thèse que la réforme vise à détruire la tradition scolaire qui a permis à la première génération scolarisée massivement (les boomers) de se tailler dans un certain rapport de force des conditions de vie décentes pour une classe moyenne nombreuse (fin des années 70). Et les profs, dans ce mouvement, ont eu beaucoup de pouvoir.

Ce pouvoir, on cherche maintenant à le détruire.La comédie de l'éducation, c'est endormir les gens et les occuper dans l'insignifiance. Dans quelques années, personne n'aura vraiment de consistance pour s'opposer intellectuellement au pouvoir et la machine de propagande aura le beau jeu. La manipulation des masses deviendra facile.

Ce mouvement souterrain a commencé dès le début des années 80 et culmine maintenant. Le mode d'installation consiste systématiquement à utiliser un cadre conceptuel abstrait et douteux qui relève de l'idéologie irréfutable comme le discours des partis communistes du régime soviétique (belle récupération par la droite de procédés de gauche. C'est justement le mouvement des sciences humaines des États-Unis qui nous tombe dessus, on sait très bien que le pouvoir là-bas subventionne la recherche pour savoir comment contrôler les masses).

On forme des équipes avec des surveillants proches du pouvoir pour surveiller tout le monde. On surveille notre comportement d'enseignants, notre discours et on fait de la délation. On force des évaluations qui nous sortent de nos références traditionnelles, on impose des évaluations communes au nom de la peur du scandale médiatique. (Je vous juge l'adjointe chez nous m'a répété mainte fois qu'il faut faire attention à ce qu'on dit on peut déformer nos paroles et se retrouver avec un parent incontrôlable, et la direction nous laisse entendre qu'elle ne nous soutinedra pas si cela arrive...: ça ressemble aux comités des citoyens qui déforment et interprètent les conduites suspectes des personnages de Milan Kundera).

Bref, on contrôle le contenu par les évaluations. Un contenu qu'on s'acharne à diluer dans l'apprentissage fumeux des processus d'apprentissage. Il ne faut plus faire échouer personne pour éviter les scandales. Cela me fait penser à cet ennemi imaginaire placardé dans les médias dans le roman 1984. On vit à l'heure de la peur du scandale scandée!

La majorité des nouveaux venus en enseignement et ils sont nombreux n'ont pas le choix de se plier au discours. Leur précarité permet au parti de sanctionner. S'ils ne sont pas assez fervents, ils deviennent suspects, bref ils doivent se montrer enthousiaste pour continuer de toucher leur beau salaire inespéré.

On choisit les surveillants d'équipe d'ailleurs en fonction de leur âge et de leur formation souvent plus ou moins adéquate dans le champ où ils travaillent. Ambitieux, ils soignent leur relation avec le parti...Pour les anciens, on applique la méthode autoritaire avec des raisonnements creux...

En fait, ils attendent tous qu'on donne nos démissions, pour faire entrer à la limite n'importe qui. Ces nouveaux venus coûteront moins chers et seront plus dociles. De toutes façon, on forme déjà des animateurs pédagogiques... Bientôt, on les formera au Cégep, on le fait déjà pour ce qui reste de l'adaptation scolaire. J'ai vu quelques départs dans l'école où je suis, pas des profs, mais des gens d'une autre génération, ils ont tous parlé de différends avec la direction... On leur a à peine dit "bonne chance" après 22 ans de service...

Dans les salles d'enseignants, j'ai été frappé, par la manifestation régulière de profs qui songent à quitter le profession. Tout le monde ressent l'insignifiance de plus en plus palpable dans laquelle on nous plonge. Et il n'y a aucune place pour discuter. C'est l'omerta et la délation.

Où sont nos syndicats? Dans une timide demande de stopper la réforme pour la corriger. Ce n'est pas une correction dont nous avons besoin, c'est d'une défense de la rigueur pédagogique et de la formation consistante de l'être humain...En fait, tant qu'on ne descendra pas dans la rue, rien ne pourra bouger vraiment et le lent mouvement de sape continue dans le silence...

J'avais quitté le monde de l'enseignement depuis 3 ans. Je sens que le discours de la réforme devient opprimant sur le terrain. Beaucoup de profs vivent des vexations dans un bureau jaune d'adjoint ou dans des échanges de courriels rouges (encore plus insidieux).

Il n'y a pas si longtemps, on n'envoyait pas à la rue les jeunes, on les dirigeait vers l'école alternative. Mais on a dans bien des milieux démantelés ces réseaux coûteux, de toute façon, on va faire passer tout le monde... La peur des jeunes de la rue, c'est encore le discours pour démolir le processus éducatif, qui donnait la possibilité de développer une intelligence perspicace.

On m'a rapporté dernièrement que dans une usine, on réunissait les employés pour des "meetings" où des responsables, connards avérés sans formation, prenaient la parole pendant de grosses heures à dire n'importe quoi...Comment peut-on critiquer l'intelligence d'un discours imbécile? Et sans avoir soi-même quelques outils intellectuels et un réseau conceptuel solide en soi, comment comprendre que le discours en avant est creux et vide de sens?

On ne vit pas vraiment un débat de société. On vit les dernières manifestations de l'intellect se révoltant contre sa dissolution. C'est le pouvoir qui mène la bal, en l'absence de contre-pouvoir... On ne gagnera pas la bataille à coup d'arguments... De tout façon, la posture du pouvoir est bien évidente dans le discours d'un Tehami au Raeq, il y a deux dogmes, irréconciliables, je suis au pouvoir et j'ai la force, bref mon dogme gagne. Peu importe vos arguments, de toute façon, mon cerveau, comme le vôtre n'est pas ouverts aux contre-arguments de l'autre.

Quand on ouvre les yeux, on remarque que l'esprit de cette réforme est partout à l'oeuvre...La crise du crédits, où on a donné sans compter de l'argent à n'importe qui, nous laisse croire que ça va mal... On ne parle parlera pas d'argent en éducation, alors qu'on continue de constater qu'on vit dans une société où l'on se paie deux, trois à quatre automobiles par maison... évidemment achetées à crédit!On oublie aussi de parler du crédit qui enchaîne, qui fait taire pour ne pas perdre sa belle cote de crédit... qui fait fermer sa gueule au boulot pour payer ses comptes...

Curieux, je reçois toujours de nouvelles propositions de crédit.

Nous vivons un âge des ténèbres qui donne prise de plus en plus au totalitarisme.

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