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samedi 19 avril 2008

Évaluation en maths diluée... L'évaluation des incompétences!

Je reproduis mon commentaire laissé sur le site École et société, il est instructif.

Bonjour M. Chartrand,

Vous avez beaucoup de patience d'analyser toute cette potion pour endormir de notre fameux conseiller. Merci tout de même, j'ai de moins en moins de patience pour me perdre dans les mots des endormeurs professionnels...

Je me bornerai à faire une observation de terrain. Je suis prof de français de formation, toutefois, par les hasards de la vie et aussi grâce à certaines dispositions naturelles, j'ai enseigné les maths assez longtemps pour prétendre y avoir une certaine expérience. J'enseigne le français en ce moment, j'ai cependant toujours une oreille et un oeil à ce que font mes collègues de maths, sait-on jamais je pourrais retourner enseigner cette matière un jour!

Or. qu'entends-je en ces jours assez surréalistes en éducation? Un prof de math d'expérience qui nous répète qu'en formation la semaine dernière, on lui a dit qu'à la limite, l'acquisition des connaissances, on s'en tape! Pour un "matheux", c'est assez effarent! Non, on doit évaluer l'effort du jeune à déployer des stratégies pour résoudre un problème. Il fait de l'humour: on approche d'évaluer le vécu du jeune en maths: comment il se sent par rapport à son problème de math? Je vous jure, ce prof est pas trop loin d'une bonne déprime, car pour lui, comme pour moi d'ailleurs, cette approche consiste à jeter au panier toute une conception des maths qui était gouvernée par une vision et des méthodes très structurées d'acquisition d'un langage rigoureux en vue de former une intelligence sérieuse et disciplinée ou de former des gens qui utilisent ces connaissances à des tâches utiles dans nos sociétés.

Autre observation: Un prof me montre une évaluation pour le secondaire 3. Deux problèmes assez ardus. De la démarche, en voulons-nous, nous en aurons. Juste le dessin (un diamant= deux pyramides, des données manquantes qui joue avec le théorème de pythagore), me laisse songeur. Mon expérience parle, j'ai quelques années de sec.3 dans le chapeau: ouille, deux-trois élèves vont y arriver dans le niveau. Bon, j'ai même pas creusé, j'ai autre chose à faire...

Et voilà, ce matin, un élève est arrivé à la bonne réponse par groupe à peu près, et ce même si des profs ne sachant pas quoi faire avec toutes ces conneries inadaptées ont montré un problème parfaitement similaire à leurs jeunes peu avant l'évaluation, histoire de les préparer un peu à l'impossible autrement.

Comment les profs doivent évaluer ce truc de fou? Bien, j'ai jeté un coup d'oeil à la grille, je commence à trouver que finalement, en français, je ne suis pas trop mal! Une dizaine de critères pour évaluer les démarches. Enfin, comme je connais un peu la réalité de la correction en maths, je me demande ce que va faire un prof devant un charabia de stratégies à peine esquissées qu'il faudra deviner d'un jeune complètement désemparé devant un problème franchement inaccessible puisque ce genre de problème convient à 2à 3 % d'élèves doués parmis les doués... On m'a sans blague rapporté qu'une personne (un adulte) bien formé en maths a mis bien du temps à trouver la solution d'un problème conçu pour des jeunes... dans l'esprit de la réforme... Doit-on rappeler à tous qu'un jeune de 3e secondaire n'est qu'en train d'accéder peu à peu à la pensée formelle selon le constructiviste bien connu Piaget?

Pendant ce temps-là tout ce qui est autour en préparation, soit un enseignement des connaissances pour se rendre dans la fameuse et fumeuse résolution, n'est pas vraiment évalué dans l'outil.

Enfin conclusion de l'observation: le prof qui vient en aide à l'autre et propose que: A est celui qui arrive à la réponse avec la démarche. B: celui qui n'y arrive pas, mais qui fait des erreurs avec la bonne démarche. C= celui qui utilise un théorème de pytagore peu importe ce qu'il fait avec... D: les autres. Voilà la rigueur émiettée balayée sous le tapis...


Quel est franchement la valeur d'un tel exercice? Voilà où nous mène l'évaluation des compétences: un prof dans son weekend en train de se demander ce que vaut une ébauche de n'importe quoi d'un élève qui n'a pas ce qu'il faut pour résoudre un problème qui n'est pas de son niveau... multiplié par 120 copies. DE quoi plonger n'importe qui dans des questionnements existentiels et dans le songe d'une réorientation professionnelle. C'est d'ailleurs le commentaire de mon autre collègue au sortir de sa formation: j'ai appris qu'il était temps que je songe à me trouver une autre job!

Voilà, j'ai soutenu ailleurs que le problème de notre école n'est pas d'être trop peu exigente, mais de l'être à un niveau démentiel au niveau des objectifs sans égard aux capacités cognitives de l'enfant en apprentissage et de, finalement, laisser dans les mains des profs de valider une réussite factice dans des procédés d'évaluation chimériques. Et ce en se tapant pour le délire des maux de tête insupportables à chercher un semblant d'intelligence dans ce qu'on fait.

Pour ma part, je revendique des objectifs réalistes pour nos jeunes. Une éducation structurée, y allant par étape, visant la maîtrise du simple, allant progressivement vers la complexité pour atteindre le réel estime de soi, celui de réussir à maîtriser et comprendre ce qu'on maîtrise. Pas de recevoir des c après avoir fait n'importe quoi et de voir dans l'oeil du maître la désolation et le sentiment d'échec, celui de n'avoir pas fait réussir des jeunes l'impossible inaccessible que nos beaux et bons leaders en éducation propose de viser au nom d 'un déni de la réalité: certains n'arriveront pas à faire certains apprentissages... Faut-il éliminer le processus d'apprentissage pour cela?

J'ai hâte que les intellectuels, plutôt que de songer changer de métier, descendent dans la rue pour négocier sans concession le retour de la formation intellectuelle que la classe moyenne moderne a droit pour pouvoir prendre vraiment part à titre de citoyen au débat de société d'une façcon active. Pour moi, il est clair, une volonté pas toujours innocente a choisi de diluer le trop grand succès même imparfait de l'éducation moderne pour tous.


Le drôle d'oiseau, F.P. ou Francis, c'est la même indignation! (Qui n'a simplement pas la position protégée pour prendre part au débat en son nom réel)

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