jeudi 30 avril 2009
Totem et tabou dans la subordination! Ou de l'impossibilité d'être un prof de français...
Aujourd'hui, j'ai fait une petite leçon sur les subordonnées improvisée parce que, on le croira ou non, mes élèves voulaient avoir un cours sur les subordonnées circonstancielles. Elles m'ont demandé aussi de revoir la complétive et la relative puisque les leçons du prof qui a quitté le navire dataient d'avant les fêtes.
Bon, heu, ok, je n'ai pas trop le temps comme on dit de préparer la leçon et hop, je me lance: bon, vous vous souvenez sûrement qu'il y a deux catégories de subordonnées: les relatives avec ... et les conjonctives, heu, désolé je suis un vieux, c'est trois catégories maintenant ( chu vieux!): relatives, complétives et la circonstancielle. Bon, en vérifiant après y a même maintenant dans la tendance super-exhaustive de la nouvelle grammaire: les subordonnées complétives interrogatives, ben oui: «Je sais pourquoi tu t'énerves avec les subordonnées et toutes leurs insubordinations!» Enfin, je revois dans Grevisse le tableau de Maurice (Pauvre Maurice, je pense que ses Précis finissent dans les déchiqueteurs ou les tonnes de papiers que même les Chinois n'arrivent plus à recycler) où, d'un bord, il y a un exemple de toutes les fonctions jouées par des mots et, de l'autre, toutes les sortes de subordonnées (sujet, attribut,etc.).
C'était une grande période pour les subordonnées et les circonstances. 8 sortes de subordonnées, imaginez! Essayez juste de faire apprécier de nos jours ce genre d'exposition d'ensemble! Ma formation en français de la vieille école est presque résumée dans cette page du Précis (p.235 dans la 28e édition revue! On gage sur quelle grammaire actuelle pour 28 éditions? Et c'était en 69. Et dire qu'on m'a presque conseillé de la jeter quand j'ai demandé si quelqu'un avait vu mon Précis traîner. Le livre a très certainement plus d'années d'édition que l'âge de la prof qui m'a dit ça...).
Les subordonnées sont toutes traitées superficiellement aujourd'hui et devenues des CP (Complément de Phrase): travailleur manipulable, supprimable, déplaçable... Je jure, je découvre comment la grammaire et le monde se prêtent à la métaphore filée et ce, sans effort!
Bref, mes apprentissages passés ne peuvent plus m'épargner une révision et une mise à jour inter-minable qui ne colle pas même si: «C'est bien plus logique de nos jours, que me fait la pimpante jeunesse responsable de français. - Tu trouves? Les filles et les gars ont juste moins de chance de reconnaître les conjonctions, l'individualisme oblige, divise et facilite les règnes, mais bon! - Toujours critique! -Ben oui, j'ai horreur de l'idéologie, ça ne se discute pas! » (Imaginez que tout cela est dit comme dans Virginie avec une vigueur scandée un peu surréel!)
Bon, je sais, je devrais pas, mais chacun sa personnalité, oui personnalité, j'aime bien faire un peu d'histoire de la grammaire (mammaire grand) et rappeler même si nous sommes dans le structuralisme autoritaire (heu logique) qui proscrit le sens et veut tout définir en terme de manipulation syntaxique (la manipulation est aussi la façon moderne de mener les hommes et les femmes sans qu'ils ne s'en aperçoivent avec de la musique de fond et du renforcement positif: «t'es beau, t'es capable». En somme, mettre des trente sous me disait un jour un boss qui me montrait les bossissitudes du métier). On doit maintenant tripoter du bout de phrase, en supprimer, en déplacer, et j'en passe... Pas foutu de foutre ses virgules entre les bouts de phrase, ou phrases syntaxiques (on dirait un problème de colonne), qu'on ne peut plus, bien entendu, appeler des propositions (péché véniel dans la nouvelle bible confondant pour les pauvres prépositions). «Quoi? me fait la responsable français, le terme n'est plus utilisé dans aucune grammaire depuis dix ans. - Un siècle. - Ainsi que indépendante. » Ben non, c'est pas beau l'indépendance, on dit autonome dans Graficor (manuel d'élève), comme dans travail autonome! et sous-traitance! et délocalisation et dislocations dans mon esprit tordu. D'ailleurs, nous sommes à l'ère de la phrase non verbale. Oui, Monsieur. Toujours est-il que je déferais ce que les autres font, parait-il, en y allant de mon petit historique sur la grammaire qui avait cours il y a juste 13 ans encore! Des fois, j'ai le goût à nouveau de claquer la porte pour un autre 3 ans! Chu fatigué et émotionnel ces jours-ci... Je dois faire une SPM par osmose dans mon milieu trop féminin.
Bref, parler du sens du mot subordonnée est presque un gros mot: les «medames» me font des gros yeux de l'évoquer comme quand je mange mes chips à 11 heures du matin. (3h ok- 11 heures non-ok, sibole que les matantes ont leur carte pour le parti facho-bouffe-comme-du-monde, le pire c'est que les gars les imitent, ça pue le pouche-pouche). Moi, je me sens plutôt prof de français, pas conseillé en diététique. En plus, leur bouffe saine comme leur nouvelle grammaire me rend malade, cherchez l'erreur. Je ne devais pas être fait pour ce monde...
Ben oui, pour revenir au principal, évoquer l'état subalterne de la subordonnée est tabou de nos jours même en grammaire. Non, il faut parler de la matrice, de la phrase matrice, du gros ventre maternel et non du principal (quelle horreur! mais je dérape: c'était la proposition principale) qu'on se représenterait bien plus en homme, en directeur d'école quoi, incarnant fermement la stature perdue de l'Autorité... Non! C'est démodé. Maudites modes! Mais bon, on doit penser quelque part éliminer le rôle principal (Rôle mateur? masculin de matrice!) Proclamons donc la phrase Matrice, à l'ère de The Matrix
Oui, à la blague, je lance à une collègue d'un certain âge que d'évoquer la proposition principale est presque un péché capital. Elle ne connait pas les péchés, oups, d'ous'que je sors coudons (me fait mon Desjardin-en-moi, les gens n'ont plus de mémoire, peuvent même pas rire mon modeste humour! Le pire c'est que dans l'école où je suis qui n'est pas jeune de bâtiments, les classifications du péché, on a du connaître cela... L'oubli, c'est un thème cher à Kundera. Je commence à comprendre. Non, elle, la collègue a tout changé, pas de problème, bout de phrase, enchâssement, enchassante, phrase graphique et syntoxique et le tralala... que nos jeunes ne comprennent pas.
Pour y voir clair, j'ai pris Graficor et son Rendez-vous! (Vous êtes cernés! et pas à peu près ces jours-ci!). Et voilà-t-y pas que j'observe ceci d'intéressant: on n'y parle plus de GS-GV-(CP) comme phrase de base, mais de sujet et de son prédicat.
Méditons à cela un peu: nous sommes passés du sujet-verbe-complément pour aller dans le délire des groupes des linguistes à la Madame Chartrand où tout est groupe, même le pauvre adjectif, la plupart du temps esseulé en orbite stationnaire près du nom, qui n'a pas le droit de qualifier depuis qu'on en a découvert de trop descriptifs (Quelle confusion, ben oui, Qualificatif est banni, je l'aimais bien, moi, tu sais, quand il se rapportait ou épithétait le nom. Faut qu'on rit, faut qu'on danse,...) Maintenant, il est une expansion supprimable, presque vulgaire du noyau du groupe nominal. Toqueville parlait de la tyrannie de la majorité, nous sommes à l'ère de la tyrannie des groupes et du travail d'équipe: un chef, des indiens. OUps, le droit des minorités va me tomber dessus.
Bref, de la folie des groupes, on revient timidement à S-P (sujet de phrase et prédicat de phrase).
Bon, bon, bon, un collègue m'explique: sujet-prédicat, ce sont les fonctions; groupe nominal sujet et groupe verbal, des natures, des classements. Bref, la fonction du groupe verbal est prédicat. Fascinant, n'est-ce pas? Je ne peux m'empêcher de penser que Maurice Grevisse a fait un Précis pour éviter de perdre les jeunes dans la profondeur de la description de la langue de haut niveau et se concentrer sur l'essentiel.
Prédicat, ça doit être de bon ton pour l`ère prédicative du Verseau!
Notez l'évolution: S-V-C => S-P et P=V-C
Et la meilleure: Vous savez comment on trouve le prédicat selon Graficor, 2e année du 1er cycle du secondaire (on en gaspille-t-y du temps en maux inutiles)?
Talam: «On repère le ou les compléments de phrases et le sujet, ce qui reste est habituellement le prédicat»! Je n'y avais pas passé. Mon char, c'est ce qui reste quand tu enlèves l'entrée, pis la remise à côté!
Pauvre groupe verbal, pauvre noyau de verbe déchu, je comprends qu'on ne sait plus conjuguer!
Imaginez avec toutes ces idées de bonnes femmes, je n'arrive pas à dire sans me sentir un peu coupable qu'il faut faire ses accords sujet-verbe... Il y a toujours un Groupe sujet bruyant qui veut s'affirmer et son ou ses noyaux, le pépin, qui nous emmêlent la pensée... Voilà ce qu'ont fait de nous les linguistes après nous avoir passé dessus et laissé au destin de ces furies qui les ont écoutés!
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2 commentaires:
Je m'intéresse à l'entrée de la nouvelle grammaire dans nos écoles. J'aimerais avoir une bibliographie sur le sujet pour comprendre le contexte dans lequel on a accepté son introduction au détriment de la grammaire traditionnelle. Je ne peux pas croire que seule Mme Chartrand soit la grande responsable de cette décision. Pouvez-vous m'aider?
Bonjour France,
Je n'ai malheureusement pas beaucoup d'informations sur le sujet. J'ai déjà fait, il me semble, quelques recherches sans vraiment trouver d'informations précises concernant cet historique. Il y a longtemps, je n'ai plus les références.
J'ai développé un peu cette question à l'autre entrée de ce blogue où vous m'avez laissé un commentaire. ici: http://profougoeland.blogspot.com/2008/03/la-fichu-libert-pdagogique.html
Je vous salue!
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